ETAPE 3 : de FONTENAY SUR LOING à BRIARE Le Canal - de 0100 à 0150 km de Paris.

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← La Bussière - Briare le Canal. [ fin d'étape ]

Avant de poursuivre et de terminer cette troisième étape, pour les curieux et les nostalgiques... Voici le parcours de l'ancien tracé.
Retour à la séparation des deux tracés un peu avant d'arriver à La Bussière.


Cette fois-ci, direction La Bussière. Photo Claude.K


Avant la déviation de 1969, l'entrée de La Bussière présentait une série de virages considérés comme dangereux.
En effet, depuis la sortie de Nogent Sur Vernisson, la route avait parcourue pas loin de 10 km de droite ligne.
Aussi, n'était-il pas rare que le conducteur se fasse surprendre par ce premier virage signalé comme dangereux.
De 1959 à 1963 on recense néanmoins pas moins de : 9 accidents, 22 blessés et 2 tués pour ce seul virage situé à l'entrée de La Bussière. (Source Wiki Sara)
Aujourd'hui le virage est dégagé, la route un peu plus large et le trafic routier en partie détourné.
Image réactive. Même lieu.

Après avoir longé le mur de clôture du château des Pêcheurs sur plusieurs centaines de mètres, nous voici à La Bussière.

La Bussière Km 0142

Géographiquement, La Bussière est située au carrefour du Gâtinais, de la Puisaye et des bords de Loire et reste très proche de la Sologne et du Berry.

Le bourg, de ce fait, se trouve sur un axe dévolu à une grande circulation.
C'est l'année de la 5 CV Citroën qui, la première, amènera régulièrement des Parisiens vers les chasses de Sologne.
En ce temps-là, les conducteurs, encore peu pressés, découvraient, s'arrêtaient et amenaient une vie nouvelle au village.

(Extrait Article La République du Centre 2012)


L'entrée du village et un second virage dangereux, vu ici en direction de Nogent sur Vernisson. Même lieu aujourd'hui. Image réactive.

Un peu d'histoire :

La commune tire son nom des buis qui y poussent.

La ville se trouvait sur le parcours d'une voie romaine et quelques débris romains ont été recueillis sur la commune.
La forteresse de La Bussière apparaît dès le XIe siècle.
Bien située sur la route de Paris à la vallée de la Loire, La Bussière devient un relais de poste et une place commerciale.

Pendant les guerres de religion, La Bussière est dans le camp catholique, alors que Gien est une place forte des protestants.

En 1567, les huguenots de Gien assiègent le château et y massacrent 17 religieux catholiques.

Le château, propriété de la famille de magistrats du Tillet, est reconstruit en un magnifique édifice du XVIIe siècle à l'architecture en brique, entouré d'une pièce d'eau et d'un jardin dessiné par Le Nôtre.
Après la Révolution, le château change de mains, il appartient depuis 1814 à la famille de Chasseval.

Mais pourquoi cet étrange nom de "Château des Pêcheurs" ?

En 1962, le comte et la comtesse de Chasseval ouvrent le château à la visite en y installant une collection remarquable d'objets d'art sur la pêche et les poissons, dont un cœlacanthe, poisson préhistorique extraordinaire.

La Bussière devient alors le Château des Pêcheurs.

http://www.chateau-de-la-bussiere.fr

En route -

Après avoir longé le mur d'enceinte du "Château des Pêcheurs", la route historique tournait jadis subitement à droite et se poursuivait en direction de l'entrée principale du château et de la rue de Paris (actuelle rue du château).
La N7 dans sa traversée de La Bussière était dangereuse. Son itinéraire empruntait plusieurs virages à angles droits, source de nombreux accrochages mais surtout de graves accidents.
Et justement, suite à l'accident d'un camion survenu au niveau du café de l'Union, à l'angle de la rue de Paris, il est décidé, vers 1940, de détourner quelque peu le tracé historique,
évitant ainsi l'entrée du château et les virages à angle droit du tracé initial.


Vers 1940, bien avant la construction de la déviation de 1969, la Nationale 7 abandonne une partie de son tracé historique par la rue de Paris (rouge),
pour passer par la courbe moins abrupte du cimetière.(Jaune)

Aujourd'hui, vous n'aurez pas le choix.
La rue vers le château est à sens interdit dans notre sens de circulation, nous obligeant à emprunter la grande courbe de la déviation post-1940.


Pour éviter les virages "accidentogènes" du centre ville, il ne suffisait pas de contourner le tracé historique, encore fallait il ralentir.
Ce 16 mars 1952, l'accident vient d'avoir lieu, la dépanneuse est sur place, on constate, on discute, on tergiverse sur les responsabilités de chacun.


A l'entrée nord du bourg, une ancienne station Shell. C'est encore marqué dessus !/ Photo Maxime Linke . Image réactive


Station Total, Garage Jean Menage, face au café de l'Union. Photo collection Martine.C - Image réactive.


Le café de l'Union, situé à l'angle de la route historique (à gauche) et du contournement post 1940 (tout droit).
Vue en direction de Nogent sur Vernisson. Au bout de la rue on distingue deux murs Michelin semblables à ceux
rencontrés à la Bifur. Image réactive


Pause photographique à l'entrée de la rue de Paris sur une Route Nationale 7 pavée, mais encore très peu encombrée par la circulation automobile.
On a donc tout le temps de faire la pause devant l'objectif, en béret et sabot, pour apparaître sur la photo.
Un attelage hippomobile se présente dans le champ, il est grand temps d'appuyer sur le déclencheur. Clic.
Image réactive.

Un petit tour par le tracé historique....

Pour prendre la direction du château, il nous faudra emprunter la rue du château, ancienne rue de Paris( puisqu'elle menait à Paris..) intégrée au tracé initial de la RN7.
Une ruelle dans son jus. Un bref, mais agréable retour en plein XVIIe siècle, qui nous donne un bon aperçu de la physionomie des villes d'antan..
On en croiserait une bruyante diligence sortant du dessous d'une porte cochère, qu'on en serait pas plus étonné que cela.
La rue longe une partie des dépendances du château des Pêcheurs, dont l'entrée se profile en bout de rue.


La rue de Paris, vue en direction de Lyon. Remarquez le panneau virage dangereux.
C'est que nous n'en avons pas terminé avec les virages. Image réactive.

A proximité de l'entrée du château, une plaque de cocher nous confirme que nous sommes bien sur l'ancien itinéraire de la Route Nationale 7.
Votre œil attentif aura repéré que le mot "NAT" est une pièce rapportée à la plaque.
En effet ces plaques apposées sous l'Empire était estampillée "Route Imp" jusqu'au changement de régime où il faudra renommer les Routes Impériales en Routes Nationales.


Aujourd'hui, la rue du château conserve toujours sa plaque de cocher rechampie en 2017 par Nicolas Jamois.


L'entrée du Château des Pêcheurs.


Euh.. faites comme si de rien n'était... On nous surveille ! Image réactive Photo trompe l'oeil J-F Lobreau

Après cette remontée dans le temps, reprenons maintenant le cours de notre voyage.
Retour au carrefour du café de l'Union.

Nous sommes maintenant rue de Lyon.
Après l'ancienne école, voici l'emplacement de l'hôtel de la Croix Blanche, dont l'accès donnait directement sur la route des vacances.
Vue l'ancienneté de l'hôtel, les congés payés n'existaient pas encore.. alors la route des vacances, il n'en était pas encore question.


Le temps des diligences, des attelages hippomobiles, des remises, des écuries et des bouteroues qui protégeaient les angles des murs,
comme ici au premier plan, est révolu. Place au confort moderne et à l'automobile. Image réactive.

A hauteur de la place de l'église, les commerces de la famille Poignard ont aujourd'hui disparu.


Aujourd'hui, seule la boulangerie subsiste, mais l'enseigne Poignard est masquée. Image réactive

La malédiction se poursuit sur la famille Michelin.
En octobre 1947 :

Robert Puiseux, gendre d'Edouard Michelin et co-directeur de l'entreprise Michelin avec Pierre Boulanger, roule au volant de sa flambant neuve et rarissime Citroën Traction Roadster 15/six, construite en 1946.
C'est lors de la traversée de La Bussière qu'il percute violemment un camion à l'arrêt.
Robert Puiseux sera gravement blessé et la Traction 15/Six partiellement détruite.
En 1950, Robert Puiseux succède à Pierre Boulanger à la tête de la Société Citroën, après le décès de ce dernier survenu le 11 novembre 1950 sur la Nationale 9 au volant d'une.. Citroën Traction Avant 15/Six à Broût-Vernet dans l'Allier.

Note : l'accident de Robert Puiseux et la destruction de sa 15/six sont connus et l'histoire circule aujourd'hui sur les sites Internet où dans les magazines spécialisés, sans jamais qu'une source ne soit citée.
Je n'ai moi même pas trouvé de source fiable. Ni articles de presse de l'époque, de photos, ou de procès verbal relatant les circonstances de l'accident à La Bussière.
Ce fait divers ne semble se transmettre que par le bouche à oreille, comme un mauvais téléphone arabe, avec le risque de voir sa réalité complètement déformée.
Je le livre ici sous toute réserve.


Ancien panneau sur la route de Gien

En route -

Nous voici place de la mairie, anciennement la gendarmerie, devant un petit rond-point où trône le monument aux morts, au carrefour des routes vers Gien et Briare.
Suivons la direction de Briare.
Nous attend ici une agréable ligne droite arborée, mi champêtre, mi rurale, qui nous mène jusqu'à la jonction avec l'actuelle route nationale7.


La Gendarmerie Nationale, et la route vers Briare. Aujourd'hui c'est la Mairie qui occupe le bâtiment


Le carrefour des routes de Gien (à droite) et Briare (tout droit). Route Nationale 7 merveilleusement ombragée.
Sur la gauche, on distingue un côté de la gendarmerie et une borne d'angle Michelin. Image réactive.


En quittant La Bussière.

La loi "Grenelle de l'environnement 2" a du bon, en cela qu'après démontage des panneaux publicitaires désormais interdits, on découvre, à même les murs, les anciennes publicités peintes.


Entrée sud, publicité peinte visible dans le sens des retours (sud-nord).


Vue vers La Bussière, ancienne signalisation en béton.



Jonction sud où la déviation de 1967 (D2007) retrouve ici son tracé historique.

En route–

Après cette escale nostalgique à La Bussière, reprenons la route, là où nous l'avions quittée, en direction de Briare.

A travers bois, on croisera ça et là quelques fourgonnettes attendant le client.
Après un virage aux voies séparées par un rail de sécurité en béton, la RN 7 longe en parallèle l'autoroute de l'arbre situé 50 mètres sur notre droite.
Décidément toutes les aires de repos du coin sont devenues des aires de services à la personne !
Attention, ce ne sont pas des baraques à frites ! Du coup, camping-car ou fourgon, on ne distingue plus les vrais touristes des vraies travailleuses.
L'ambiance est glauque, voila un nouveau paysage que je ne connaissait pas de cette Nationale 7, reconvertie en route départementale de passe. Bof !!

Perso, je ne me risquerais pas à pique-niquer dans le coin.
Plutôt tenter le coup au "Relais de la Frite" quelques kilomètres plus loin au hameau de Bel-Air d'Arrabloy.


Le "Relais de la frite", une charmante paillote du bord de route, sous les arbres.
Sympa et sans prétention, il flotte ici comme un air de vacances avant les vacances.
Depuis 1978, petits prix, toiles cirées et parasols sont au rendez-vous sur le bord de la N7.


Avez vous remarqué la forme du bâtiment du Relais de la Frite ?
Une maison de garde-barrière. C'est que nous sommes pile poil au passage à niveau PN 69 de la ligne de chemin de fer qui reliait Gien à Auxerre.
Sur cette section Gien - Fontenoy, la voie unique fut inaugurée en 1883 et exploitée par la compagnie PLM.
La ligne fermera en 1952, les voies seront déposées à la fin des années 1950.

Reste aujourd'hui l'emplacement d'une voie verte, restée non exploitée sur ce secteur de la N7.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Ligne_d%27Auxerre-Saint-Gervais_à_Gien

Quand le train desservait la Puisaye : www.lyonne.fr/

Construite par l'État, la ligne Auxerre-Gien fut exploitée dès 1884 par la compagnie du PLM, entre Gien et Toucy, et dès 1885 entre Toucy et Auxerre.
Trois trains pour voyageurs et marchandises circulaient quotidiennement dans chaque sens.
De 4h00 de parcours à ses débuts, le trajet Auxerre-Gien passa à 2h30 après avoir subi quelques améliorations de matériel et le changement de ses locomotives.
Malgré cela, l'automobile plus rapide s'avéra être une concurrente de plus en plus sérieuse pour la petite ligne qui, finalement, s'arrêta définitivement en 1952.


La maison du Garde Barrière... Il faut donc imaginer, à cet endroit, et jusqu'en 1952, une voie ferrée traversant la Route Nationale de part en part.
Peut-être même avec un passage à niveau et des barrières !

En route -

Nous entrons dans le Pays du Val de Loire, Patrimoine Mondial. (Facile, c'est marqué sur le panneau)

Le Val de Loire c'est la région correspondant à la partie de la vallée de la Loire située, d'amont en aval, dans les départements du Loiret, de Loir-et-Cher, d'Indre-et-Loire (région Centre)
et de Maine-et-Loire (région Pays de la Loire). Le Val de Loire héberge la plupart des châteaux reconnus sous l'appellation de Châteaux de la Loire ainsi que plusieurs vignobles.
Il est inscrit depuis 2000 au patrimoine mondial de L'UNESCO (Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture).


Le Val de Loire Patrimoine Mondial


Passage sous L'A77

La route passe sous l'A77.

La Route Nationale 7 ne traverse plus Briare depuis la fin des années 1970.
Une rocade, sur 2x2 voies contourne la ville par l'ouest.

La jonction entre les deux tracés se situe juste après être passé sous l' A 77.
Nous y reviendrons dans un instant.


Jonction nord de la déviation de Briare D2007 / N7 (tout droit) et de son ancien tracé par la D 952 (à droite).

Pour le moment poursuivons sur la D2007/RN7 qui contourne Briare.

 

 

 

Extrait du Journal Officiel de 1968, fixant les travaux sur la RN7 pour le département du Loiret.

 

Le projet initial du contournement de Briare date de 1965. Projet revu et corrigé en 1968, mais finalement jugé trop coûteux par le Ministère de l’Équipementt et du Logement, et donc abandonné.
Un nouvel Avant-Projet Sommaire ( APS) concernant la déviation de Briare fut présenté le 7 mai 1974.
Cet APS avait des caractéristiques beaucoup plus confortables que celui envisagé précédemment, puisque toutes les voies croisant la déviation se trouvaient soit rétablies par un ouvrage d’art, soit déviées vers un autre pont.
Quant au franchissement du canal et de la rivière, il était désormais prévu par le biais d’un seul viaduc d’une portée de 176,20 m.
Du fait de ces divers éléments, le profil en long de la déviation s’en trouvait largement amélioré par rapport au projet de 1968.

Cet APS fut validé par décision ministérielle le 6 janvier 1975 et donna suite à un APD (Avant-Projet Définitif) le 15 septembre 1975.


Échangeur Nord source de bouchon avec ses "céder le passage" et ses priorités à droite.
En rouge le tracé original , en jaune la toute nouvelle déviation sur 2 x 1 voie

La déviation de Briare fut officiellement ouverte le 28 juin 1979 sous forme d’une route à 2 voies.
Son doublement, ainsi que la dénivellation du carrefour Nord, furent déclarés d’utilité publique le 19 mars 1982.
Les travaux de mise à 2x2 voies débutèrent en juin 1984 et furent terminés en décembre de la même année.
Les travaux de dénivellation de l’échangeur Nord, quant à eux, furent commencés en novembre 1985 et furent livrés 7 mois plus tard en juin 1986. (extrait Wiki Sara)

Grand merci à Frantz H et Maxime L pour leurs infos et correctifs.


Réaménagement en cours des bretelles d'accès de l'échangeur Nord.
Pour une fin annoncée des bouchons.

Souvenir de Maxime L :
Avant 1986, il fallait effectivement contourner le gigantesque bouchon de Briare (créer par l'échangeur) en passant par Saint-Fargeau, très loin, car le bouchon était long.
La ville de Briare ne bénéficiait même pas de ces ralentissements interminables, les automobilistes étaient trop excédés pour songer à s'acheter quoi que ce soit.

En route -

Poursuivons sur la déviation 2x2 voies, qui contourne Briare par l'est, et franchit finalement le double canal de Briare.
Le fameux " Pont canal "n'est pas visible d'ici.
La chaussée repasse sur 2 voies alternées avant de franchir la voie ferrée exploitée par les convois exceptionnels EDF alimentant la centrale nucléaire de Belleville.


Viaduc sur le double canal latéral à la Loire.


En contrebas, la voie ferrée exploitée par les rames EDF.

Le rond-point suivant marque la jonction avec l'ancien tracé de la Route Nationale 7 qui débouche sur notre droite.
Il est maintenant temps de nous y aventurer.

Briare par l'ancien tracé. Retour à la jonction Nord.


En route -

Débutons la balade par la bretelle sur la droite qui nous amène naturellement sur l'axe de l'ex RN7 dénommée ici D2107.
Nous voici à Briare le Canal.


Au fil des déclassements, l'ancienne N7 est devenue D 957, D 2007, aujourd'hui D 2107.
L'identification de la route, située au dessus du nom d'agglomération a bien du mal à suivre les évolutions.

Briare Le Canal Km 0150

Un peu d'histoire et un peu de Géo :

La ville a pris son essor sous Henri IV grâce à la construction du canal de "Loyre en Seyne" qui deviendra le canal de Briare. Ce canal, construit au XVIIe siècle, relie la Loire à la Seine.
La ville est située sur la Loire, à 8 kilomètres à l'est et en amont de Gien et à 74 km à l'est d'Orléans.
Elle est reliée à Paris, dont elle est distante de 151 km par l'autoroute A77, la Nationale 7, la ligne ferroviaire Paris-Nevers et le canal de Briare (prolongé par le canal du Loing).

Le nom que Briare s'est donné, « Briare-le-Canal », est un peu réducteur car Briare ne possède pas un, mais trois canaux.
Dès 1605, elle accueille le chantier du « canal de Loyre en Seyne », futur canal de Briare qui sera ouvert totalement en 1642.
En 1838, ce canal reçoit, juste à l'amont de son écluse de Baraban, le canal latéral à la Loire qui descend de Digoin.
Ce canal traverse la Loire dans son lit-même, à cinq kilomètres en amont, à Châtillon-sur-Loire.

Ce croisement dans les eaux de la Loire s'avère dangereux et rapidement ne répond plus aux exigences du trafic fluvial.
C'est pourquoi en 1896, une nouvelle branche du canal latéral est construite, traversant le fleuve par un pont-canal.
Cette nouvelle branche du canal latéral à la Loire reçoit le surnom de « nouveau canal » ou « canal neuf ».

En route -

Nous sommes pour l'instant en zone d'activité commerciale, mais la route reste tout de même agréable avec ses bas côtés verdoyants et entretenus.
On ne rencontre pas ici la sensation d'écrasement que l'on pouvait trouver dans la zone commerciale de Montargis-Amilly par exemple.
L'ensemble est aéré, mais pour combien de temps encore ?


Sur la gauche, une borne à l'entrée de Briare, indique l'ancienne frontière de l'octroi , la contribution sur les marchandises importées.

Nous roulons sur l'avenue Yver Bapterosses, nom d'un des petits fils de Jean-Félix Bapterosses, l'inventeur et l'industriel du pays (voir plus loin les émaux de Briare).
La ville lui semble être redevable, car voici à droite le stade Yver Bapterosses.

Plus loin, un panneau annonce le musée de la Mosaïque et des Émaux de Briare :
"Où comment, Jean-Félix Bapterosses, inventeur précoce et entrepreneur avant l'heure, réussit à ruiner, grâce à ses brevets et ses inventions, l'industrie anglaise de fabrication des boutons qui en avait jusqu'alors le monopole".

Pour en savoir plus sur l'homme : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Félix_Bapterosses
Le musée : http://www.emauxdebriare.com/museefr.php


Mobiloil côté gauche.

Après le château d'eau, un ancien garage Citroën toujours en activité, et de chaque côté, une publicité murale pour Mobiloil.


Défilé traditionnel de La Commune Libre de la Plaine à Briare juste après la seconde Guerre Mondiale.
La commune libre était un mouvement citoyen perpétuant les traditions et les coutumes régionales.
On reconnaît en arrière plan le garage de la famille Corre, sur le pignon duquel on distingue une inscription Mobiloil et sur la droite, une pompe à essence.
Même lieu aujourd'hui. Image réactive
Photo collection Sylvie Girault / Mobiloil . Photo Greg.B

De l'autre côté de la rue, une surprise attend les plus observateurs...

Il y a de cela quelques années, des milliers de véhicules empruntaient l'avenue Bapterosses, sur deux fois deux voies, y créant un trafic routier proche de celui d'une voie expresse.
Sur la gauche de la chaussée, en face du garage Citroën, une borne N7 marquait la distance vers Briare-centre ou Cosne sur Loire.


La borne sauvegardée. Photo Claude K.
Merci au propriétaire des lieux pour avoir autorisé l'accès sur son terrain.

Lors du réaménagement de la chaussée sur 2X1 voie, intégrant piste cyclable et larges trottoirs arborés, la borne N7 fut menacée de disparition par les ouvriers de la voirie.
Heureusement, le propriétaire du pavillon situé face à cette borne eut la bonne idée de la reculer de quelques mètres.

Aujourd'hui elle coule des jours heureux à l'intérieur de la propriété en bordure de clôture et du tracé historique de la Route Nationale 7.
Heureuse initiative de sauvegarde.

En route -

Quelques mètres plus bas, au calvaire, l'entrée du domaine des Roches, un luxueux relais château.
La route poursuit sa descente en direction des bords de Loire, jusqu'au rond point de la légion d'honneur, où trône le monument aux morts des guerres de 1870.
Carrefour de route vers Gien et Orléans d'un côté et vers Montargis et Paris de l'autre.
Au rond-point prendre la direction Boulevard Buyser à gauche.


Une vue du Boulevard de la Gare, actuel Boulevard Buyser en direction du centre ville. Image réactive.


Vers 1930 en direction de la N7 ou de la N152


Dès l'entrée du Boulevard de la gare : Le Café de la Gare, sa pompe à essence et un mur Michelin
On constate qu'à l'époque, avec le nombre de murs Michelin disposés aux carrefours des routes,
il était pratiquement impossible de se tromper de direction.


L'agréable terrasse ombragée du café de la gare et la pompe essence Shell. Image réactive.
Chez Yvette et Max, c'était la convivialité assurée.


Les murs de la Manufacture des Emaux de Briare. Photos J-F Lobreau

Nous passons devant le musée de la mosaïque et des émaux de Briare.

Au 19ème siècle Briare poursuit son essor avec la création d’une manufacture de faïence fine (dite litho-cérame).
C'est l'ingénieur et homme d'affaire Jean Félix Bapterosses, de passage à Briare qui remarque par hasard une ancienne manufacture en faillite sur les bords de la Loire.
Il rachète l'entreprise moribonde, y délocalise son usine parisienne et réoriente la production vers la fabrication de boutons, perles et mosaïques en émail, dont il détient les brevets de fabrication.
La manufacture de Monsieur Bapterosses emploiera jusqu'à 10 000 ouvriers.
En plus de l'usine gigantesque avec ses alignements de cheminées, le site comprend des cités ouvrières logeant jusqu'à 200 familles.
Des écoles construites au sein même de l'usine accueillaient les enfants des employés. Monsieur Bapterosses breveta même un système de pupitre ajustable pour les enfants.

En 1880, on dit alors de Briare qu'elle est devenue « la cité des perles »

Pour en savoir beaucoup plus :
https://emauxdebriare.com
https://fr.wikipedia.org/wiki/Émaux_de_Briare

En face, un autre musée : le musée des deux marines et du Pont Canal.

Le Musée Conservatoire des Deux Marines et du Pont-Canal présente l’histoire des marines de Loire et des Canaux, canal de Briare (de Loire en Seine) canal latéral et sa traversée de la Loire.
C’est le Centre de découverte unique de ce qui était considéré comme le plus important carrefour batelier de France.

https://www.musee-2-marines.com/index.php


Le genre de graffiti que l'on aimerait voir plus souvent... Photo JF Lobreau

En route -

Le Boulevard Buyser est agréable, arboré, ombragé, avec quelques commerces et aux beaux jours des terrasses de cafés ou de restaurants disposées sur le trottoir, on se croirait presque revenus aux grandes heures de la RN7.
Avec ses canaux, son Pont Canal et son petit port de plaisance, les touristes sont de sortie et c'est une bonne chose.
Du coup certains établissements ont traversé les âges et accueillent, depuis des générations, les voyageurs de la route mais aussi les marins d'eau douce en quête d'une bonne nuit de repos après une rude navigation sur les canaux de Loire. :-))
Un peu plus loin, l'hôtel "Du Cerf " en est l'exemple parfait.


Plus d'un siècle d'existence pour l'Hôtel Du Cerf, vu ici courant des années 70.. Image réactive


Un verre en terrasse et une circulation fluide sur la route bleue juste avant de franchir le pont.
Même lieu aujourd'hui. Image réactive.

Voilà le pont Henri IV qui surplombe un croquignolet port de plaisance sur la Loire, avec quais, écluses et capitainerie. Prenez le temps de vous y arrêter.

Après le pont et son agréable quartier des quais, on entre dans la rue de la Liberté, la rue commerçante, ancienne "Grande Rue".


Briare et sa Grande Rue / Route Nationale 7 pavée. Même lieu aujourd'hui. Image réactive.


Le 1er décembre 1978, la quincaillerie droguerie Desamais s'installe dans les anciens locaux du garage Central.
L'entreprise fermera définitivement en juin 1997.
Auparavant c'est le garage Central, tenu par la famille Corre depuis la fin de la première guerre mondiale, qui occupait le lieu.
Image réactive.


L'ancienne Gendarmerie Nationale. Cliché enseigne JF Lobreau

Après le port, engouffrons nous tout droit dans la rue de la liberté, ex-Grande rue, dont l'étroitesse confirme l'absolue nécessité d'une voie de contournement de la ville.
Sur notre droite, à l'emplacement du parking de la supérette, se situait le célèbre "Hôtel de la Poste".

Marquons ici un arrêt historique.

Rendez-vous route impériale 8 : Briare le 20 avril 1814 :

Le 6 avril 1814, Napoléon signe son abdication sans condition. Le 11 avril, Caulaincourt et Macdonald signent à Paris une convention donnant à Napoléon la souveraineté de l'île d'Elbe.

Le 20 avril, les plénipotentiaires alliés, chargés d'escorter Napoléon vers l'île d'Elbe, étant arrivés la veille, Napoléon quitte Fontainebleau après avoir fait ses adieux à sa vieille garde impériale dans la cour du château de Fontainebleau.

Le cortège constitué des voitures des généraux, de la voiture de l'empereur, de celles des officiers et aides de camps ainsi que de la suite impériale accompagnée des domestiques, s'éloigne au grand galop pour rejoindre l'île d'Elbe.

Cet imposant convoi composé de quatorze voitures et de cavaliers, nécessite le renouvellement de soixante chevaux à chaque relais sur la route impériale. La plupart des relais ne possédant pas la totalité de cette logistique, les 6 dernières voitures qui composent une partie de la suite de l'empereur emprunteront une route différente.

Napoléon et son escorte principale voyage sur la route Impériale N° 8, qui deviendra Route Nationale 7 en 1824.
Le convoi passe à Nemours, puis Montargis et arrive en début de soirée à Briare, première étape sur le chemin de l'exil.
Après avoir passé en revue le "bataillon Napoléon" assemblé pour lui rendre les honneurs, l'Empereur s'installe à l'Hôtel de La Poste, ancien relais de poste tenu par M Blot, pour y passer la nuit. Ce soir là Napoléon soupa seul avec le général Bertrand.

Dans la nuit, des gendarmes arborant la cocarde blanche eurent l'imprudence de déambuler dans les rues. Ils furent molestés par les grognards, jusqu'à l'arrivée de Cambronne qui fit rétablir l'ordre promptement.

Dans son livre "Histoire de Briare avant le Canal" (éditions ville de Briare 1987) Paul Gache décrit un Relais de la Poste avec ses écuries, sa cour pavée, son quai, ses greniers à fourrage, sa halle servant d'abri aux carrosses et, par derrière un grand jardin allant jusqu'aux murailles de la rue des Fossés.

En 1923, Pierre Pinsseau dans son livre "Briare-Le-Canal et ses Seigneurs" ajoute :

A l' Hôtel de la Poste Napoléon déjeûna dans un endroit qu'on appelle la Galerie et qui existe encore de nos jours. (en 1923)
Rien n'a changé dans la chambre où coucha Napoléon 1er. Le papier qui recouvre les murs est toujours le même; le lit et le fauteuil sont également restés, seuls les rideaux ont été enlevés.
Les propriétaires successifs de l'hôtel, M.Mathieu, M. Martin-Gallet, M.Galopin, et actuellement Mme Alasseur ont tenu à en conserver le souvenir intact, et de nos jours on ne pénètre qu'avec une sorte de respect dans cette immense chambre
qui hébergea l'Empereur des Français Napoléon 1er.
Dix ans plus tôt, le pape Pie VII se rendant au couronnement de l'Empereur à Paris s'était également arrêté à l'hôtel de la Poste de Briare.

Gageons que cette nuit du 20 avril 1814, il ne devait pas y avoir beaucoup de chambres de libres à l'hôtel de la Poste de Briare.

Diverses Sources : Wiki, http://www.villedebriare.fr/, Briare le canal - historique et pittoresque de Pierre Pinsseau 1938.
Briare-Le-Canal et ses Seigneurs de Pierre Pinsseau, Histoire de Briare avant le Canal Paul Gache. 1923


Un lieu historique, aujourd'hui un supermarché. Image réactive.


L'Hôtel de la Poste, dans son jus, très proche de ce que Napoléon a dû connaître...avec sa porte cochère vers les écuries.

Durant les années 50 et 60 l'hôtel recommandé par le Touring Club de France était une étape appréciée des touristes de passage.
Après sa fermeture à la fin des années 60, l'hôtel resta un temps abandonné, avant d'être entièrement rasé en 1969 pour laisser place à un petit supermarché et son parking.


Encore quelques années de répit avant sa destruction.
Même lieu Image réactive.


Juste en face de l'hôtel de la Poste, le café du commerce et la salle de cinéma "le Modern" qui deviendra plus tard Le Rex.
L'unique cinéma de Briare. On aperçoit à l'extrême droite quelques photos d'exploitation d'un film à l'affiche.
Même lieu. Image réactive.

En route -

Il faut, dans la Grande Rue, avancer le nez en l'air afin d'observer à loisir l'architecture XVIIIe et parfois plus ancienne des bâtiments qui la jalonnent.
Mansardes, vieilles pierres, portes cochères, cours intérieures pavées sont au rendez-vous derrières les modernes bardages des boutiques actuelles.

Place de la République voici l'église Saint Etienne, une église presque contemporaine car construite en 1886, par les industriels Alfred Loreau et Paul Yver, gendres de l'entrepreneur Jean-Félix Bapterosses.
L'église précédente, datée du XIIIe siècle, avait été endommagée par la crue de la Loire de 1856.
Fragilisée et devenue trop petite compte tenu de l'essor que connaissait la ville en cette période industrielle, il fut décidé d'en reconstruire une plus grande.


La place de la république et l'église St Etienne à la mode seventies

Le Café de l'Agriculture à l'angle de la place et de la Route Nationale 7 n'est autre que le premier relais de la poste aux chevaux à Briare.
Le bâtiment deviendra par la suite un service de messagerie pour le carrosse de Moulins, assurant tous les deux jours la desserte de la route des carrosses.


L'imposante bâtisse du Café de l'Agriculture. Image réactive.


La rue de la Liberté à l'angle de la place de la République en 1974 et ...47 ans plus tard. Image réactive.
Photo collection Nicolas G.

Poursuivons notre route par la seconde partie de la rue de la Liberté, un peu moins commerçante.

Allez ! Il serait dommage de passer à côté sans aller lui rendre visite. Il s'agit bien entendu du Pont Canal.
Arrivé en bout de rue, juste avant de franchir le pont sur le canal, un panneau nous indique la direction à prendre sur la droite.
350 mètres plus loin vous pourrez laisser la voiture sur les parkings des quais ou bien juste après le pont du port et continuer la ballade à pieds le long des berges.
Une flânerie historique et industrielle bien sympathique à ne pas manquer.


Le Pont Canal de Briare

Un peu d'histoire :

Bien avant la fin du 19e siècle, les bateaux descendant par le canal latéral à la Loire devaient traverser cette dernière pour rejoindre ensuite le canal de Briare.
Ce passage s'effectuait dans un chenal endigué long d'un kilomètre en travers du fleuve.
Le canal latéral poursuivait ensuite son trajet jusqu'à Briare où il rejoignait le canal de Briare.
Cette traversée était soumise aux aléas du débit du fleuve et était assez dangereuse, motivant la construction d'un pont-canal.

Le projet est déclaré d'utilité publique en 1889, et la construction débute en 1890.
La conception est due aux ingénieurs Léonce-Abel Mazoyer et Charles Sigault, la maçonnerie fut confiée à Gustave Eiffel.

Entièrement métallique, la voie d'eau est bordée de deux trottoirs et d'une rangée de lampadaires.
Son abord est marqué de chaque côté de deux colonnes rostrales ornementées

Le pont-canal de Briare est établi sur quatorze piles, construites sur des caissons profonds de 5 à 8 mètres. Sur ces piles est posée une poutre métallique unique qui supporte une cuvette en U qui contient plus de 13 000 tonnes d'eau (2,2 mètres de profondeur). La largeur du pont, chemins de halages compris est de 11,5 mètres, sa longueur de 662,7 mètres.
Il est ouvert à la navigation en 1896.

En juin 1940, lors de la débâcle de l'armée française, le pont-canal sera dynamité, afin de retarder la progression de l'armée allemande.

Pour en savoir plus :
http://lecoursdelavie.canalblog.com/archives/2011/09/02/21920731.html

https://fr.wikipedia.org/wiki/Pont-canal_de_Briare


Traversée de la Loire, par le pont canal. Image réactive.


Le pont de la Liberté, route de Bonny, vue en direction du centre-ville de Briare. Image réactive
L'époque n'était pas avare de publicités.

En route -
Après cette escale marinière, retour Rue de la Liberté, pour le franchissement du canal.
On trouvera aux alentours quelques publicités murales hélas assez mal conservées.


Les publicités ont perduré sur ce mur. En fond on distingue une St Raphaël


Publicité au dessus du cimetière.


Le vénérable Hôtel restaurant du Midi vers 1940. Même vue aujourd'hui. Image réactive.

Passé le pont métallique, le quartier devient maintenant plus résidentiel.
La rue s'élargit un peu, la circulation se fait plus tranquille, nous abordons les faubourgs de sortie de ville le long de l'avenue De Lattre de Tassigny, anciennement route de Bonny.
Avec ses petites maisonnettes des années 30 le quartier paraît tout à coup plus contemporain.
Un quartier hors de la ville, dont l'épicentre semble être le bar-restaurant du Midi.
Avec sa terrasse ombragée en bordure de route, ce vénérable établissement nous invite à remonter le temps....
Arrêtons nous ici, le temps d'un souvenir d'enfance, raconté par Jean Paul.


Le Briare des années 60

Rendez-vous nationale 7 : Briare - Hôtel du Midi - Mercredi 15 juin 1960.

La bougie de Briare

Paris et sa banlieue, début des années soixante. Papa, Maman et moi, j’ai 5 ans.
Cette année-là nous sommes partis de la maison après le déjeuner et non le matin, je ne sais plus pour quelle raison.
C’était le jour du départ en vacances d’été, mes parents m’ont retiré de l’école avant la fin de l’année scolaire, c’était courant dans les petites classes à cette époque-là sans que ça pose de problèmes métaphysiques aux instituteurs, pour peu que le gamin ait eu des résultats corrects tout au long de l’année.

La voiture a été lestée le matin même des deux grosses valises familiales dont l’une est très à la mode avec son habillage rouge écossais, la capote du toit ouvrant a été enroulée sur la moitié de sa longueur ;
Un dernier tour de maison afin de s’assurer que tout est bien fermé et c’est parti, en route pour les vacances !

Dès le départ, la bonne humeur et un joyeux enthousiasme animent notre vaillante 2cv . Itinéraire invariable, du moins pour la moitié nord de la France : la nationale 7.
Le passage au pied de l’obélisque à la sortie de Fontainebleau marque la vraie évasion, l’instant précis du lâcher-prise de la région parisienne car nous venions parfois passer le dimanche en forêt, en toute saison, selon la disponibilité de mes parents.

Il fait très beau et chaud en cet après-midi de mi-juin; je suis assis sur la barre du milieu de la banquette arrière, tous mes sens sont en éveil, je ne veux rien rater du spectacle du paysage qui défile.
Le sympathique hôtel familial nous attend, comme tous les ans à pareille époque et pour de nombreuses années ultérieures, avec son jardin embaumé de végétation méditerranéenne, tout près de la plage. La petite ville côtière n’est pas encore ravagée par les constructions des promoteurs ; Saint-Tropez n’est qu’à quelques kilomètres mais son nom n’est encore connu que de quelques habitués privilégiés, c’était le temps juste avant l’explosion dite « touristique » mais on ne le savait pas encore. De plus, j’allais retrouver les enfants des hôteliers, ils étaient de mon âge et m’incluaient dans leurs jeux comme si j’étais de leur famille, donc que du bonheur.

Pour l’heure, nous baignons dans l’allégresse, nous roulons vers 4 semaines de félicité….
La voiture file, elle a des ailes ; elle aussi participe à la liesse générale, on la sent pleine de bonne volonté, vive et légère, impatiente de rejoindre au plus vite l’ombre douce des pins parasols. (bon, pour la vivacité, tout est relatif quand même, c’était une 2cv !)

Soudain, en pleine nature quelques kilomètres avant Briare, un énorme bruit sec et métallique interrompt net le ronron du moteur.
Stupéfaction de la famille, arrêt immédiat dans l’herbe haute du bas côté.
Mon père lève le capot, diagnostic : la bougie du cylindre gauche a disparu, ni plus ni moins ! elle a pris des vacances elle aussi !
Juste le petit trou noir de son emplacement sur le haut du moteur, une des extrémités du gros fil rouge d’allumage pendouille tristement dans le vide.
Pas de rechange dans le sac d’outillage, il ne reste plus qu’à la retrouver (?).
Nous voilà donc tous les trois penchés vers le sol à la recherche de cette bougie vers l’endroit supposé de son atterrissage.
Sur cette portion, la nationale 7 était alors à 2 voies, bien plus étroite qu’aujourd’hui, et dans mon souvenir il n’y avait que très peu de circulation cet après-midi là.

On fouille, on fouille et… miracle ! C’est moi qui la retrouve dans l’herbe de l’autre côté de la route ! pas peu fier….
En routard expérimenté (souvenir de ses longues randonnées à vélo lorsqu’il était célibataire), mon père n’était jamais à court de bouts de ficelle, fil de fer et autres rouleaux de scotch pour un dépannage éventuel.
En l’occurrence, il réussit à refixer la bougie en place à l’aide d’un peu de filasse de plomberie !

Suspens lors du premier coup de démarreur, mais ça tourne bien ; espérons que ça tienne jusqu'à Briare.

Là, nous allons directement à l’ancien garage Citroën, en plein centre ville ; le bâtiment était dans l’alignement des autres, il n'existe plus aujourd'hui, remplacé par un parking communal .
Le garagiste est d’abord réticent à effectuer la réparation car il a déjà du travail en retard, mais au terme d’une discussion entre lui et mon père alors que ma mère et moi restions à l’écart un peu anxieux de son bon vouloir, il est convenu que nous revenions le lendemain matin, la voiture serait prête.

Du coup nous sommes contraints de passer la nuit sur place, nous allons dans un petit hôtel parmi les dernières habitations à la sortie de la ville vers le sud, après le pont canal ;
je revois très bien cette maison qui existe encore, mais son activité hôtelière a cessé depuis bien longtemps.
Pour atténuer cet incident et notre impatience de dévorer la distance jusqu’à la grande bleue, nous allons au cinéma du centre ville après le dîner,
mes parents ayant remarqué au passage qu’une séance se jouait ce soir là ; je ne me souviens plus du titre du film.

Le lendemain matin, à la première heure, mon père retourne au garage récupérer la 2cv, effectivement réparée ;
le garagiste a fait au plus simple, pas de réparation de la culasse mais son remplacement par une toute neuve… bon, plus cher mais plus fiable. En route pour la méditerranée !

Que dire de ce souvenir ?
Sur le plan mécanique, cette panne était due à un précédent montage de bougies inadaptées, d’origine anglaise de marque Lodge censées délivrer plus de puissance, mais le pas de filetage (pas anglais) était légèrement différent de celui des bougies européennes ; ce qui eût pour conséquence de dégrader son maintien en place, jusqu'à la rupture. Heureusement la seconde a tenu jusqu’au retour des vacances et mon père a alors rectifié correctement le filetage de la culasse de droite pour y monter des bougies d’origine Citroën. Cette réparation a tenu toute la vie de la voiture.

Sur le plan humain, je revois très bien cet ancien garage donnant directement sur la rue principale et étroite de Briare (aujourd'hui rue de la Liberté, tracé historique de la nationale 7), et ce garagiste d’un âge certain qui s’affairait sur le moteur d’une Traction Avant lorsque nous sommes entrés dans son atelier. Peu souriant mais mesurant immédiatement notre situation.
Dans un premier temps, il a proposé d’effectuer le nécessaire dès le lendemain matin afin que nous récupérions la voiture en fin de journée mais devant la perspective d’une journée de vacances entière perdue à attendre, mon père l’a convaincu d’entamer la réparation le soir même.
Je ne sais pas quels ont été les arguments employés, probablement une proposition de rémunération d’heures supplémentaires, mais il a accepté et nous a même emmenés dans son ID19 flambant neuve jusqu’à l’hôtel qu’il nous avait indiqué. Que pouvait-il faire de plus ?

Peut-on imaginer qu’aujourd’hui, en pareille situation, un quelconque centre auto ou concessionnaire de marque implanté en zone commerciale en périphérie de ville accepte de réparer la nuit ?
Et aurait-il la pièce de rechange en stock sur place ?
Serait-il sensible à la contrariété de parents et leur mouflet obligés de faire patienter 24h supplémentaires leur soif de soleil et de sable chaud, de vacances tant attendues depuis 11 mois ?
D’ailleurs existe-t-il encore un petit garage de centre ville quelque part le long d'une route nationale ?


Juin 1960, enfin arrivés à Cavalaire !

Voilà, c’était un souvenir personnel parmi tant d’autres, qui fait revivre une époque définitivement révolue de la nationale 7.
L’excitation du départ attendu depuis des semaines, l’euphorie dès les premiers tours de roue sur la nationale 7 synonyme de vacances immédiates, l’impression d’être déjà très loin en province alors que Chailly-en-bière est à peine passé, le moteur qu’on répare sur le bord de la route en pleine rase campagne avec un bout de filasse, le vieux garagiste un peu bourru mais consciencieux et au cœur d’or, le petit hôtel impromptu, modeste mais très accueillant et chaleureux, qui serait aujourd’hui complètement hors normes, et le cinéma ouvert un soir d’été en semaine dans ce gros bourg qu’était Briare dans les années 50-60.

Alors je sais bien qu’aujourd’hui, un départ en vacances (même très courtes puisque trois jours d’absence sont des « vacances ») s’effectue à plusieurs reprises tout au long de l’année et que parcourir 1000 km ne représente plus vraiment une aventure, du moins dans des conditions normales, et c’est tant mieux ; mais franchement, Il y a de quoi être un peu nostalgique, non ?
Parce que je vous assure qu’en 1960, pour un gamin parisien dénué de famille implantée à la campagne, le vrai dépaysement, les découvertes étonnantes, l’ouverture sur le monde, ça commençait sur la nationale 7, porte d’Italie.

Ps. Nostalgie ne signifie pas obligatoirement regret, ni passéisme ; le « c’était mieux avant » n’est ni universel ni objectif.
Juste reconnaître qu’avant l’ère du smartphone et ses accros les yeux baissés en permanence sur l’écran 4 ou 5G en tous lieux et toutes circonstances, les gens d’alors (vous savez, les Anciens…) pouvaient réfléchir, se parler, se rencontrer, échanger, s'entraider, éprouver des sensations, découvrir des univers inconnus, s’émerveiller en touchant une statue ou un arbre séculaire, se croire au paradis parce qu’effleuré par une brise d’été chargée d’effluves florales, annoter de commentaires une carte routière, et même se « déconnecter » vraiment de tout (le mot n’existait pas encore) pendant leurs vacances… le tout dans la vie bien réelle ! ….si, si, c’était possible.
C’est vrai qu’ils n’avaient pas d’écran pour regarder le paysage qu’ils étaient en train de traverser, juste un pare-brise ; plus grand certes, mais qui pouvait éventuellement être brisé par un seul gravillon, alors qu’avec un écran souple…

Jean Paul M

En route -

Poursuivons notre avancée vers la sortie de Briare. Sortie marquée par la borne de l'Octroi.

 

 

La borne d'octroi n'était pas une borne destinée à indiquer une quelconque distance, elle marquait une frontière, une délimitation.

Installées généralement aux portes des villes, les bornes situaient les barrières de péage.
Car l'octroi était un impôt destiné à la commune. Une taxe sur l'importation des marchandises qui franchissaient les portes de la ville.

 

Cet impôt instauré dès le XIIe siècle, sera supprimé définitivement en 1943 à la date du 1er août du gouvernement Pierre Laval.


Au 80 Avenue De Lattre-de-Tassigny, une publicité murale pour le Café Quotidien. Image réactive. Photo J.F Lobreau.


A la sortie de Briare, plus rien ne laisse soupçonner la présence d'un ancien mur peint.
Le ravalement est passé par là depuis déjà plusieurs années. Image réactive

Cette section de route n'a guère changée depuis 60 ans.
Le tracé, les champs, les bois, toute cette physionomie alentours est restée authentique.

Encore quelques mètres et la D957 tracé historique, rejoint la déviation de Briare au niveau du rond-point. Nous sommes à 151 Km de Paris.

C'est ici que nous terminons cette 3e étape.

Fin de la troisième étape


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