ETAPE 14 : de Mondragon à Bonpas

03 /05
← Bédarrides - Sorgues →

En route -

C'est reparti en direction d'Avignon par une longue ligne droite bordée sur la gauche de platanes et de champs de cultures.
La route, ici, pourrait nous donner l'illusion d'être en rase campagne, mais c'est hélas sans compter sur l'omniprésence de l'autoroute du soleil à peine cachée derrière la haie sur notre droite.


Sur la gauche, les vestiges publicitaires de la route nationale 7. Sur la droite .. l'autoroute A7

C'est en 1964, que cette section autoroutière voit le jour, reliant sur 10 km, le sud de Piolenc, au nord de Courthézon, permettant ainsi de dévier toute l'agglomération Orangeoise.
Cette portion sera intégrée en 1965 à l'autoroute A7 et deviendra payante suite à sa concession à la SAVR (Société de l'Autoroute de la Vallée du Rhône).

A compter de cette date, la route nationale 7 devra dès lors partager son itinéraire bucolique avec celui de l'autoroute, dont les chaussées sur 2 x 3 voies chevauchent parfois intégralement le tracé original de la vieille route, obligeant ainsi la N7 à rompre son trajet rectiligne en d'imperceptibles et longues courbes.


Toujours sur la gauche, les traces d'une anciennes station service.

Au niveau du pont-passerelle franchissant notre route et l'autoroute A7, on perd temporairement le tracé original de la nationale 7.
En effet, à cet endroit la route d'avant 1963, bifurquait légèrement sur la droite.
L'autoroute en 1963 coupera la nationale 7 en 2, et par endroit, la chevauchera intégralement, la faisant disparaître totalement

Le tracé de la route a bien entendu été rectifié depuis et se poursuit désormais tout droit.


Photo couleur : les 2 X 3 voies de l'autoroute A7 séparées par une haie de la route nationale 7. Image réactive
Cliché noir &blanc 1953. 10 ans avant la construction de l'autoroute du Soleil, la route nationale 7 passe au ras des maisons.

Les cartes anciennes permettent de mieux percevoir les modifications afférentes à la construction de l'autoroute en 1964.
L'occasion pour nous de découvrir un nouveau délaissé.

Empruntons la passerelle en prenant immédiatement à gauche, et franchissons l'autoroute.

Nous sommes maintenant sur un délaissé de la nationale 7, qui à défaut de nous restituer le charme désuet et nostalgique d'une route abandonnée,
va nous plonger, certes avec un peu d'imagination, au cœur des années 60.
Le seul indice repérable aujourd'hui se situe sur le mur de pierre d'une propriété clôturée.
Une discrète mention MOTEL à peine lisible, surmontée de deux étoiles... seul vestige de l'effervescence qui régnait ici aux grandes heures de la route nationale 7.
Je soupçonne de votre part un léger scepticisme... si si ! et pourtant regardez de plus près....


Effectivement, si vous passez la tête - discrètement - par dessus la clôture, vous vous rendrez compte que l'architecture générale du lotissement confirme que ce lieu était bel et bien un Motel.
Le Motel 7, ouvert au début des années 1960, était un établissement réputé le long de la nationale 7.
Idéalement situé au milieu des vignes, il proposait un confort avant-gardiste, copié sur le modèle américain.

Rappelons que le terme motel est la contraction américaine de Motor et Hôtel, des établissements spécialement conçus pour les automobilistes.
Le Motel 7 ne dérogeait pas à la règle de la mode US, proposant dans une ambiance classe et colorée les services de son Bar-Hôtel-Restaurant et de sa Station Service Total, avec préposés en uniforme.
De cette époque fameuse, subsiste, pour notre plus grand plaisir, une courte séquence filmée en 1958.


Les grandes heures du Motel 7. Cliquez sur la photo pour télécharger une courte vidéo tournée au Motel en 1958.

Malmené lors de la construction de l'autoroute A7, le motel restera accessible de la nouvelle route nationale grâce à une passerelle enjambant l'autoroute.
Mais cela ne suffira pas à maintenir son activité. Délaissé, oublié, le motel fermera définitivement ses portes en avril 1973.

En route -

Le reste du délaissé ne nous apprendra rien de plus. Reprenons la D907 et poursuivons notre voyage jusqu'à Bédarrides.

Bédarrides Km 0675

Bédarrides est une localité ancienne, puisque son nom provient du Latin "Bitturritae", qui veut dire "les deux tours".
Ces tours étaient dressées sur le territoire après la victoire romaine sur les Allobroges lors de la bataille de VINDALIUM en 121 avant J.C.

La conquête romaine en fit une villa (Villa Bittorita).
Devenue propriété de l'Empereur Louis l'Aveugle (Louis III de Provence), ce dernier en fit donation à l'Evêque Rémi en 912.
A partir de cette époque, les archevêques d'Avignon furent Seigneurs spirituels et temporels de Bédarrides et de son territoire; et ceci jusqu'en 1791 date à laquelle Bédarrides comme l'ensemble du Comtat Venaissin furent rattachés à la France.

Source : http://www.ville-bedarrides.com

Située au centre du triangle touristique exceptionnel formé par les villes d'Avignon, Carpentras et Orange, Bédarrides est une petite ville du Vaucluse, à l'accent chantant, chef-lieu de canton, bâtie au confluent de la Sorgue, de l'Ouvèze et de la Seille, qui préserve l'esprit village, hérité de plusieurs siècles d'histoire. La commune renferme de beaux paysages et un patrimoine historique qui mérite une visite.
Bédarrides est située sur la route des vins et produit du Châteauneuf et du Côte du Rhône. (extrait du site de la mairie)


En rouge la route de Marseille à Lyon, future nationale 7 passe un peu en retrait du centre de Bédarrides.
Carte d'Etat Major 1859.

En route -

La nationale 7 n'est jamais vraiment passée par le centre ville de Bédarrides situé un peu en retrait sur les bords de l'Ouvèze.
La route traverse en fait le quartier St Louis, carrefour de routes dont on trouve la trace sur les cartes d'état major sous l'appellation l'Auberge de St Louis, signe d'une activité hôtelière avérée, en des temps plus anciens.
Aujourd'hui, le carrefour St Louis existe toujours, mais question hôtellerie, il faudra chercher le logis ailleurs.


Ici, autrefois, l'on y mangeait et l'on y dansait.


C'était bien, chez Laurette
Quand on faisait la fête ...

C'était bien, c'était chouette
Quand on était fauché
Elle payait pour nous, Laurette...


L'établissement dansant "Chez Laurette", a fermé ses portes en 2009.
Clin d’œil indéniable à la chanson populaire de Michel Delpech "Chez laurette" (1965) dont les paroles sont de Michel Delpech et la musique de Roland Vincent, son proche ami, célèbre compositeur de musique résidant à Bédarrides;
Wight Is Wight, Pour un flirt, Les Divorcés, Quand j'étais chanteur c'est Roland Vincent mais c'est aussi plus de 600 chansons de Dalida à Reggiani, en passant par Nicole Croisille, France Gall, Carlos ou Sacha Distel et plus de 100 musiques de films.


Au carrefour de l'ancien tracé et de sa déviation.

Ne quittons pas le quartier St Louis tout de suite... car le coin recèle sa part d'ésotérisme.
A quelques mètres de là, au bout d'une étroite impasse, on se retrouve devant les grilles du château du "Mont Thabor", un domaine viticole d'appellation contrôlée Châteauneuf du Pape et Côte du Rhône.
Jusque là rien de bien mystérieux...si ce n'est ce nom de Mont Thabor..

Certes le Mont Thabor est situé en Israël, mais si cette bâtisse-forte porte toujours le nom qui lui fut donné en 1784, c'est pour d'obscures raisons attribuées à Dom Pernety, bénédictin de la congrégation de St Maur, moine défroqué, alchimiste et écrivain, fondateur de la loge maçonnique des Illuminés d'Avignon, également connue sous le nom des illuminés du Mont Thabor, car les membres de la secte se réunissaient ici, à Bédarrides, invités par le maître des lieux de l'époque le marquis de Vaucroze, pour y pratiquer le rite hermétique et l'art sacré.

Mais remontons les siècles, jusqu'au XVIIIe siècle, au temps de l'Illuminisme, un courant de pensée allant à l'encontre des esprits matérialistes des philosophes de l'époque.
Ce mouvement fondé sur l'inspiration intérieure va influencer les organisations ésotériques, les sociétés secrètes, et les obédiences maçonniques.

Dom Pernety découvre l'hermétisme en 1757, dans la bibliothèque de l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés. Extrêmement cultivé et érudit, il part en 1762-1763, avec Bougainville pour les îles Malouines en tant qu’aumônier et naturaliste. Revenu en France, il renie ses vœux et se rend pour la première fois en Avignon où il entre dans la loge des Sectateurs de la Vérité. Pour fuir l'Inquisition il s’exile à Berlin auprès de Frédéric II de Prusse, qui le nomme conservateur de sa bibliothèque. Dès lors il peut continuer ses recherches sur le Grand Œuvre et se lance dans l’étude de vieux grimoires afin de découvrir le secret de la pierre philosophale. Il se passionne pour les doctrines mystiques du suédois Emanuel Swedenborg et fonde, avec le comte polonais Grabienka, les Illuminés de Berlin.

En 1782, Pernety accompagné du Comte échappent à la répression prussienne. Ils reviennent en Avignon et acceptent l'invitation du marquis de Vaucroze, riche propriétaire terrien à Bédarrides qui se dit prêt à les accueillir chez lui, dans une de ses propriétés baptisée dès lors le Temple du Mont Thabor.

La société secrète à la fin du XVIIIe siècle se compose d'une centaine de membres, qui sous la direction de Dom Pernety vont se vouer à l’alchimie, à l’étude des textes anciens et des mystères sacrés.
Au Mont Thabor on y prédit l'oracle et l'on communique avec les anges célestes.

La révolution dispersera les membres de la secte des Illuminés du Mont Thabor, et Pernety arrêté puis finalement relâché, décédera à Avignon le 16 octobre 1796.

Sources et Extraits :

En route -

On l'a vu précédemment, la nationale 7 ne traversait pas le centre ville de Bédarrides.
Pourtant en 1968, après la construction de l'autoroute du Soleil, la physionomie du carrefour St Louis va changer.
Une déviation verra le jour, permettant aux plus pressés d'éviter la traversée de quartiers plutôt résidentiels et peu encombrés.
Quelques entrepôts et entreprises artisanales viendront s' installer le long de cette nouvelle voie, créant ainsi une petite zone commerciale et industrielle.


En rouge la déviation post 1968.
En bleu le tracé originel.

Pour emprunter la déviation qui franchit l'autoroute un peu plus loin, il suffit, au carrefour, de poursuivre tout droit en direction d'Avignon par la D907.
Les moins pressés emprunteront le tracé original de la route, celui d'avant 1968, en suivant la direction Châteauneuf du Pape sur la droite.

Cette route originale n'est pour ainsi dire pas plus avenante que la déviation.
L'avenue St Louis franchit également l'autoroute, mais en passant par dessous, puis traverse alors un faubourg pavillonnaire sans grand intérêt, avant de retrouver la jonction avec la D907.

Avant notre départ, Bédarrides nous gratifie tout de même d'un dernier délaissé.


Court délaissé de route nationale 7, à la sortie de Bédarrides.


Ancien atelier sur ancienne route...

On Poursuit -

Au prochain rond-point, au cœur d'une petite zone industrielle, plus aucune trace aujourd'hui du "Relais de Chateauneuf", le garage / Station service de la famille Catto.
Un établissement bien connu en son temps.


Sur la droite l'ancien Relais de Châteauneuf / Aujourd'hui tout a disparu. Image réactive.


Le relais de Châteauneuf


Au fil de la route nationale 7. Publicité pour Cap Sud centre commercial à Avignon.


Le resto Relais de Châteauneuf existe toujours aujourd'hui, et puis il fait bar à vins... Image réactive.


Engrais Michel Frères, à Sorgues.

Depuis mai 1996, la D 907 contourne sur 2 x 2 voies la ville de Sorgues par l'ouest.

Cette déviation relativement récente qui franchit l'Ouvèze, se veut être un ensemble architectural spécifiquement conçu pour ce site qui l'accueille et l'intègre.

Pour les automobilistes, et surtout pour les riverains qui voient les deux faces de la déviation, la nature a repris ses droits : 200 arbres et 15 000 arbustes plantés, murs anti-bruits, traitements paysagés des talus et des giratoires.

Entre les 35 000 m2 de prairies et le ruban qui défile, entre la déviation et l'environnement, les limites s'estompent.

Des écrans acoustiques de 2 à 3 mètres de hauteur sur 750 m, basés sur une alternance de séquences longues en aluminium et brèves en cèdre rouge, baissent le son et rappellent la dynamique du transit face à la permanence du riverain.

Enfin l'unité de style des ouvrages d'art, le travail de la matière et des couleurs, donnent à la déviation sa cohérence et son caractère propre.

Extraits : https://www.archicontemporaine.org/RMA/p-1-lg8-Accueil.htm

 

Une première déviation avait déjà vu le jour en 1956, entre Sorgues et Avignon, mais celle ci avait été intégrée à l'autoroute A7 entre1963 et 1965, devenant dès lors payante.

Avant 1996, la route nationale 7 passait donc par le centre de Sorgues.
Etroite artère alors régulièrement sclérosée en été, qui longtemps malmena la vie des riverains.

C'est cet ancien itinéraire que nous allons maintenant emprunter, délaissant le contournement actuel, un peu trop récent, et qui n'apportera rien de plus en matière de nostalgie.

A hauteur du petit centre commercial visible sur notre gauche, prenons à droite la sortie vers Sorgues.

Sorgues Km 0678

Sorgues (avec un S) ou Sorgues sur l'Ouvèze, vient de la rivière Sorgue qui prend sa source à Fontaine de Vaucluse, et se jette dans l'Ouvèze à Bédarrides.
En provençal, sorga, du latin surgere, "surgir, apparaître", désigne une source importante ou une résurgence donnant naissance à une rivière.

extrait : Wikipédia

A l'origine Sorgues s’appelle Villam Sorgam.
C’est en 1063, que la cité prend le nom de Pont-de-Sorgo en provençal, en référence à la présence d'un nouveau pont de pierre construit en remplacement d'un vétuste pont de bois.
Après la révolution, le nom de la ville perd sa référence au pont. Elle se nomme "Ville de Sorgues" ou "Sorgues" tout court.
C'est pour empêcher les erreurs de destination que l'administration des Postes a créé "Sorgues sur l'Ouvèze", toponymie aujourd'hui encore peu usitée.

https://www.etudessorguaises.fr

En route -

L'entrée de Sorgues se fait par l'avenue d'Orange qui dans sa première partie regroupe une petite zone commerciale à taille humaine, agrémentée de quelques garages de quartier aujourd'hui toujours en activité.
Sympa.


Un garage à l'ancienne, avenue d'Orange.

Un peu plus loin, le pont sur l'Ouvèze, situe la véritable entrée de Sorgues.
Nous sommes quartier du Grand Pont.
Le pont actuel a été construit en 1835. Il remplace l'antique pont de pierre de style roman surmonté d'une croix de mission, semblable au pont roman que l'on peut toujours voir à Bédarrides.
Aujourd'hui il ne reste aucune trace de cet ancien pont de pierre, si ce n'est sur les armoiries de la ville et sur quelques gravures anciennes.


Au centre du blason, le pont roman de Sorgues.

A cet endroit, le comte de Toulouse, suzerain du comté de Provence, érige un château fort, sentinelle avancée sur la route de France, dont le pont muni d’une vigie, de parapets et de meurtrières surveille les abords et assure la défense de ce passage.
Le contrôle de cet important axe de communication nord – sud est ainsi assuré tout en générant de lucratifs revenus car, pour franchir le pont, un péage est instauré, le droit de barre, destiné aux voyageurs et aux marchands non sorguais.
C'est sur l'emplacement de ce château fort que de 1318 à 1324, le pape Jean XXII fit édifier la toute première résidence pontificale de la Papauté d'Avignon, 18 ans avant le Palais des Papes d'Avignon.
Lorsque les Papes seront transférés à Avignon, le Palais de Sorgues sera transformé en résidence d'été.


Le tout premier Palais des Papes est construit à l'emplacement de l'ancien château fort.
Sur cette gravure du XVIIe siècle, on aperçoit également le vieux pont Roman sur l'Ouvèze.


Le quartier du Pont sur l'Ouvèze en 1962. Image réactive.


La façade de cette maison située à l'entrée de la cité, s'est prêtée de tout temps à la publicité. Trafic routier oblige.


Arles Cité Romaine Porte de la Camargue


Stratégiquement bien située, on ne pouvait pas rater la publicité pour l'Hôtel d'Europe, un des plus vieux hôtel de France,
toujours en activité aujourd'hui.

Juste après le pont, la rue du Château (sur la gauche) vous mènera jusqu'au Palais des Papes...enfin ce qu'il en reste...

On ne rencontre pas un palais pontifical tous les jours, qui plus est... "le tout premier palais pontifical " construit en France, 18 ans avant le palais des Papes d'Avignon ...
Attardons nous un peu sur son histoire, vous avez bien 5 minutes non ?

Le premier des 9 Papes d'Avignon fut Clément V.
Différentes raisons, dont l'affaire des Templiers, l'amenèrent en 1309 à Avignon, ville vassale du Saint-Siège et voisine du Comtat Venaissin, propriété effective de l'Eglise depuis 1274.
Il ne séjourna à Avignon que par intermittence et logea au couvent des Dominicains.

Pont-de-Sorgues, qui appartenait au Comtat Venaissin, était également une propriété pontificale de l'église
Or, il y avait nécessité pour Jean XXII, second pape en Avignon, de frapper monnaie au nom de la papauté, ce qui était impossible à Avignon, fief du comté de Provence.
Pont de Sorgues accueillit donc un Palais pontifical et un atelier monétaire, éléments essentiels de la politique pontificale pour asseoir la prééminence de la papauté avignonnaise.

Le pape ne se contenta pas de Pont-de-Sorgues mais installa, tant dans le Venaissin que dans son ancien évêché d'Avignon, d’autres châteaux, à Châteauneuf (du Pape), Bédarrides ou encore à Noves.
Cette multiplicité, offrait à la papauté une alternance possible de résidences et permettait surtout une bonne maîtrise des voies menant à Avignon.


Ce qu'il reste du Palais des Papes. Encore visible aujourd'hui.

Durant près de 75 années , de nombreux pontifes occupèrent les lieux, soit à temps plein (Jean XXIII), soit en résidence d'été (Urbain V), soit partiellement (Innocent VI ), ou même jamais (Clément VI).
Le dernier pontife avignonnais à venir à Pont-de-Sorgues fut benoit XIII.
Son premier séjour fut pour fuir la peste qui menaçait Avignon.
Il s'installa au palais du 6 novembre 1397 au 19 janvier 1398.
Puis il y revint avec ses familiers en 1403.

La réunion des Etats Généraux du Royaume en 1409 fut la dernière venue d'importance au palais.
Celui-ci fut délaissé et non entretenu, à tel point que 300 mètres de ses murs s'écroulèrent en mars 1413.
Les guerres de religion portèrent un coup fatal à l’édifice, presque entièrement brûlé en 1562.

Au XVIIe siècle, Louis XIV, le cardinal Mazarin et d’Artagnan, commandant des mousquetaires du Roi seront parmi les derniers à dormir dans les ruines du château avant d’aller assiéger Orange.

Après un nouvel incendie en 1799, les restes du Palais furent finalement cédés à des entrepreneurs qui exploitèrent le site comme carrière de pierres.

Aujourd'hui de nombreuses bâtisses, dont l'église, sont en partie construites avec les pierres du Palais papal.

https://fr.wikivoyage.org/wiki/Sorgues
https://fr.wikipedia.org/wiki/Palais_des_papes_de_Sorgues
http://www.palais-des-papes.com/fr

 


Publicité peinte avenue d'Orange. Photo Claude.K

En route -

Le vieux Sorgues laisse parfois entrevoir à travers ses ruelles enchevêtrées quelques pans de remparts ou des bribes d'édifices oubliés, derniers vestiges visibles de son riche passé Historique.
Les noms de rue permettent aussi de mieux appréhender la physionomie du bourg comme la rue du château, la rue des remparts, la rue du portail, la rue de la Tour, ou encore l'impasse des jardins du château.

Abandonnons les ruelles étroites du vieux Sorgues et poursuivons.
Les anciennes cartes d'état major l'attestent, la route impériale longe le village en parallèle, comme le fait aujourd'hui l'avenue d'Orange, faubourg résidentiel effacé, vite traversé.
Nous sommes sur le tracé des anciens remparts sur le côté Ouest de la cité provençale.


Garage de quartier, transformé en dépôt de meuble.


Sur quel genre de véhicule apprenait-on à conduire ?


Enseigne désuète pour commerce moribond...


En rouge le tracé actuel, en bleu le tracé au XIXe siècle

L'avenue d'Orange se poursuit rectiligne jusqu'au Château St Hubert.
Mais au XIXe siècle, même si les remparts ont disparu, la configuration des rues n'est pas tout à fait la même qu'aujourd'hui.
La route nationale passait alors par la place du Portail, qui situait la porte de la ville fortifiée, puis par le Cours de la Sorgue devenus tous deux après la révolution la place de la République et le Cours de la République.


Place de la République. Les roues à aubes rappellent le passé industriel de Sorgues.

Au niveau du petit rond-point, bifurquons sur la gauche pour emprunter la rue du Pontillac et déboucher sur la charmante placette de la République, bordée par un cours d'eau et des roues à aubes.
Dans son prolongement, le cours de la république a perdu de son charme avec son canal recouvert et la disparition des platanes.


Le Cours de la République vers 1955 et aujourd'hui. Image réactive.

Fin XVIIIe, début du XIXe siècle, à l'emplacement des boutiques et des habitations qui jalonnent actuellement le cours, s'élevait l'auberge de la Croix Blanche, un relais de diligence situé à l'époque hors les murs de la ville, comprenant une vaste remise flanquée d'un corps de logis entourant une cour.

On ne sait en quelle année le relais cessa son activité, mais en 1842, une partie de la remise de l'auberge de la Croix Blanche fut vendue et transformée en habitation comportant au rez de chaussée un local commercial.
S'y installeront au fil des années un atelier de tailleurs, un café, un bazar...


Le cours de la République vers les années 1960. Image réactive.
Sur la droite l'îlot de commerces marquant l'emplacement de l'ancienne auberge de la Croix Blanche.


Fresque murale : Entrée d'un Pape dans la ville de Sorgues

Poursuivons en direction du rond-point du château St Hubert, sans oublier de jeter un oeil sur la fresque murale du restaurant en coin "la Détente".
Fresque en deux parties dont la partie basse nous rappelle le séjour que firent Pablo Picasso et Georges Braque à Sorgues en 1912.


Séjour de Picasso et Braque à Sorgues en 1912.


A la jonction du Cours de La République et de l'Avenue d'Orange. Image réactive.

Nous voici face au Château Saint Hubert, demeure construite en 1782, pour un gentilhomme du roi, issu d'une grande famille d'avocats.
Le château marque également le début de la très longue avenue d'Avignon, qui nous dirigera jusqu'à la route nationale 7.


Le château St Hubert.

Et maintenant notre séquence culturelle !

La fresque en trompe l’œil vue précédemment y faisait allusion :

En 1912, les peintres Picasso et Braque se rencontrent à Sorgues.
Durant trois mois, ils mènent un travail en commun : un tournant capital dans l’histoire de l’art qui rompt définitivement avec le système figuratif de la Renaissance.
Le 23 juin 1912, Pablo Picasso écrit à son marchand d'art, Daniel-Henry Kahnweiler : "Maintenant j'ai trouvé un pays très joli, Sorgues, à 10km d'Avignon, et j'ai trouvé une maison avec un petit jardin et un tapissier qui me louera des meubles".
C'est ainsi qu'il s'installa avec Eva à la villa " Les Clochettes ".

L'artiste, rapidement rejoint par Georges Braque va connaître dans ce lieu une période heureuse et particulièrement créative.
Sorgues constitue une étape fondamentale dans le mouvement du cubisme et voit l'invention d'une sensibilité aussi nouvelle que féconde : les papiers collés.
Le cubisme est à son apogée et révolutionne radicalement les formes picturales.
Les multiples œuvres de premier plan présentées lors des plus récentes expositions associent le nom de Sorgues avec les grandes heures de la peinture cubiste.
Reflet de son amour pour Eva qu'il nomme " Ma Jolie ", Picasso réalisera une émouvante peinture sur un des murs de sa villa.

Après le départ de Picasso, Kahnweiler le marchand d'Art, fera emporter la surface du mur où était peint ce tableau ovale.

Séduit par la campagne sorguaise, avec ses cyprès et ses nombreux cours d’eau, Georges Braque reviendra chaque été de 1913 à 1916.
C’est là qu’il se réfugiera pour oublier la guerre, sa blessure, sa trépanation et son inquiétude à l’idée de reprendre ses pinceaux.

Au début de l'avenue d'Avignon, sur la gauche, un peu dissimulée, presque invisible, une étroite ruelle, uniquement pour piéton, vous mènera 50 mètres plus loin, devant le portail de la maison occupée par Picasso en 1912.

En route -


L'avenue d'Avignon, vue vers Sorgues au début du XXe siècle. On remarque les rails de Tramway et les platanes.
A droite, l'ancien relais de la poste aux chevaux. Image réactive.

Au XIXe siècle, Avenue d'Avignon, on trouvait à hauteur de l'actuel n° 185, le Relais de la poste aux chevaux, appartenant à monsieur Albert Simon.
Le bâtiment existe toujours aujourd'hui.

Référence : Etudes Sorgaises.


Avenue d'Avignon, vue en direction d'Avignon. A droite la gendarmerie, à gauche le petit bâtiment carré était le bureau de l'Octroi.
Aujourd'hui même point de vue. Image réactive.

On quitte Sorgues un peu avant le grand rond-point qui permet de retrouver la "récente" déviation D907 / N7.

Prenons la direction du Pontet et longeons, sur notre droite, les terrains de l'usine Eurenco, à l'emplacement de l'ancienne Poudrerie Nationale.
La Poudrerie Nationale a vue le jour pendant l'effort de guerre en novembre 1915.

A l'époque, dans la région, seule la poudrerie de St Chamas située dans les bouches du Rhône est en activité, mais durant la première guerre mondiale, sa production s'avère insuffisante.
Stratégiquement située entre Rhône et Route nationale 7, la Poudrerie de Sorgues doit pouvoir répondre aux nouveaux besoins des armées.

La construction de la Poudrerie en 1915 et le démarrage progressif des unités de production d’explosifs en avril 1916 font travailler à Sorgues une nombreuse main-d’oeuvre masculine et féminine (environ 6000 personnes travaillent à la Poudrerie de Sorgues). Il ne faut pas perdre de vue que la plupart sont des soldats venus de divers corps de troupe, affectés à la Poudrerie comme travailleurs.
Il faut les nourrir, les loger.
Pour ces hommes éloignés de leur famille, les Cafés et les bistrots restent des lieux où ils retrouvent des amis et une forme de vie sociale qui permet de s’adapter à cette situation nouvelle.
L’environnement direct de la Poudrerie offre ce genre de prestations puisque l’on y dénombre, fin 1916, pas moins de 17 établissements proposant boissons, nourriture avec parfois des possibilités de logement.

Source et Extraits :

https://www.etudessorguaises.fr/index.php/economie/95-la-poudrerie-nationale-de-sorgues-1915-1920

Tous ces commerces sont en fait des baraques de bois ou des roulottes, alignées sur les bords de la route nationale 7 aux environs de la poudrerie ou des berges du Rhône.
On y sert des repas sous forme de plats ou de casse croûte, du café au lait le matin, mais surtout, l'on y sert du vin et de l'eau de vie.
Aux yeux des autorités militaires et préfectorales, cette pratique met en danger la sécurité des ouvriers de la Poudrerie qui effectuent un travail dangereux.
Une réglementation sévère frappe les débitants servant des boissons alcoolisées.
Le directeur de la poudrerie demande des mesures pour frapper sévèrement les contrevenants ainsi que la fermeture des établissements qui mettent en danger la sécurité et l’ordre public.

Aujourd'hui, le groupe Eurenco, filliale de la SNPE (Société Nationale des Poudres et Explosifs) occupe toujours les lieux, mais les baraquements ont disparu.

En route -

Non ! encore un instant :

Ici même, devant l'entrée de la poudrerie va se dérouler un drame aujourdhui oublié.

Albert Roche Le premier Soldat de France.

Albert Roche était un jeune cultivateur originaire de Réauville (Drôme).
Avant de s'installer brièvement à Valréas puis à Sorgues, le soldat Albert Roche avait été blessé à neuf reprises au combat et avait multiplié les actes de bravoure au sein de son bataillon de chasseurs alpins.
Albert Roche avait aussi habilement trompé l'ennemi lorsque sa section avait été décimée par les tirs allemands.
Albert Roche avait capturé huit prisonniers et les mitrailleuses ennemies.
Albert Roche a aussi escorté le soldat inconnu sous l'Arc de Triomphe.

Pour le maréchal Foch, le poilu Albert Roche était le "premier soldat de France" en 1918.
Sept citations, Croix de guerre et officier de la légion d'honneur.

Après la guerre, le premier soldat de France retombe dans l'anonymat.
Il est employé à la poudrerie de Sorgues en tant que pompier.

Ci-contre : Le soldat Roche et le Maréchal Foch en novembre 1918.

Ci dessous extrait du Paris Soir du Dimanche 16 avril 1939.

 


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