ETAPE 17 : de St Maximin la Ste Baume (800 km) à Vidauban (850 km)

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En direction du Luc en Provence, on repérera, de-ci de-là, quelques rectifications de tracé, consistant principalement à adoucir certains virages trop serrés.
L'occasion aujourd'hui de découvrir quelques courts délaissés de la route, époque années 50.


A gauche, le tracé d'origine, repérable à sa rangée de platanes. A droite la nouvelle route construite à partir des années 1960.


Même lieu que ci-dessus, avant et après rectification


Dénivellation encore visible entre les routes d'avant et d'après 1960.

Ci-contre flèches bleues le tracé historique

Le Luc en Provence Km 0837

Voici encore un de ces petits villages du Var aux rues aussi étroites que la voie Aurélienne qui passait par ce "bois sacré" dans l'antiquité. (Bois sacré : de "Lucus" locution latine qui donnera Lo Luc en provençal)
Le Luc, village rue à la physionomie mal adaptée à une circulation routière devenue de plus en plus dense au cours des trente glorieuses.
Ici aussi l'entrée de ville s'encombrait de longues files d'automobiles lors des périodes estivales, malgré tout un réseau de sens uniques mis en place par la municipalité afin de faciliter la fluidité du trafic routier.

En 1963, une déviation est inaugurée. Pour la circulation automobiles dans les étroites rues du centre ville, l'effet est salutaire.
Esthétiquement c'est autre chose. La bretelle de contournement semble comme posée au milieu du village, à l'image de ces toboggans routiers qui fleurissaient au cours des années 70.
Des pans entiers de la vieille ville ont ainsi disparu pour laisser place à une balafre urbaine, pratique certes, mais mal intégrée au paysage.
Mais y avait-il moyen de faire autrement ?

En 1973, on remet ça, avec cette fois-ci l'autoroute A8 qui surplombe l'ensemble du village.

Bref, la ville du Luc, située au carrefour des RN97 et RN95, futures N7, reliée à l'autoroute A8 par les échangeurs du Cannet des Maures, est aujourd'hui très loin de notre petit Bois Sacré de l'époque romaine.


Le Luc vue aérienne en direction d'Antibes
A gauche l'autoroute A8 construite en 1972, à droite la rocade de 1963, au centre le tracé historique.

Lorsque l'on vient de Brignoles, le tracé historique de la RN7, celui d'avant 1963, n'est plus indiqué.
Il sera de toute façon difficile à suivre dans notre sens de circulation, celui-ci étant aujourd'hui en partie en sens interdit dans la direction Nord/Sud

Continuons donc notre lancée par le périph' post 1960.
On entame alors une forte descente, pour nous retrouver à hauteur des toits du village. Vous vous souvenez le toboggan ?
A peine le temps de remarquer le clocher hexagonale de l'église Notre Dame de Nazareth sur la droite, que nous atteignons le carrefour avec la route de Toulon, l'ancienne RN97.
C'est ici, que la RN 95 reliant Brignoles au Luc se terminait à l'époque où la RN7 passait par l'arrière pays Varois.
On empruntait alors la RN97 qui venait de Toulon et se poursuivait jusqu'à Antibes. (après la réforme du 16 avril 1930 et le décret du 15 décembre 1931 dans le Var, la RN97 deviendra officiellement RN7)


La déviation semble comme posée au dessus des toits du Luc.

Beaucoup de panneaux publicitaires 4 x 3 récents, mais avec un peu d'attention on peut encore apercevoir d'anciennes publicités peintes.


Dans la descente.


Vue dans la montée. Les Vins Pradel. Depuis le ravalement de façade est passé, la pub a disparu, mais pas le panneau 4X3 :-(


La N97 en provenance de Toulon, passe au pied de la tour héxagonale de l'église Notre Dame de Nazareth, avant de rejoindre la N95/N7

Rendez-vous nationale 7 : Mardi 5 août 1969 - 06h00 - Le Luc en Provence.


Alors bien dormi ? nous lance mon père à la cantonade !
Notre dernière nuit passée à la belle étoile, au pied de la montagne Ste Victoire, ne nous a pas été très profitable, question sommeil.
Excités par la proximité de notre destination, nous n'avons que très peu fermé l’œil.
La nuit trop vite tombée après notre pique-nique vespéral d'hier, ne nous a pas laissé le temps d'apprécier notre petit coin tranquille entre vignes et garrigue.
Très vite il fallut sortir les lampes de poches, l'occasion de jeux nocturnes ponctués d'amusantes frayeurs pour les enfants, tandis que les parents préparaient un sommaire campement de fortune.

Les matelas pneumatiques gonflés et posés à l'extérieur de l'automobile pour les parents, la banquette arrière confortablement aménagée pour ma sœur et moi, et la douceur provençale de cette nuit noire étoilée m'ont laissé le souvenir indélébile d'une bienheureuse quiétude familiale.
Levés aux aurores, nous avons repris la route pour couvrir les derniers kilomètres de notre voyage.
La petite Opel s'est faufilée dans les étroites rues des villages Varois encore endormis.
Nous voici maintenant au Luc au petit matin.
C'est ici que nous quittons définitivement la route nationale 7 pour poursuivre en direction de Toulon puis du Lavandou que nous rejoindrons par le massif des Maures et sa route tortueuse.
Trois semaines de camping, et surtout dans mes souvenirs ce voyage inoubliable dont j'ai conservé des images sans doute trompeuses d'une France insouciante, de gens sans prétentions satisfaits de leur condition, d'une époque où tout semblait relativement libre, facile, où l'on ne se posait pas de question existentielle. Tu as envie de le faire.. fais le !

Une époque bariolée, où l'on prenait le temps de vivre, où la vie n'était pas encore bridée par des principes de précaution, des normes et des protocoles aberrants qui aujourd'hui alourdissent notre quotidien.
Des voitures sans assistance électronique qui ne prenaient pas le chauffeur pour un imbécile, en lui signalant par un bip sonore et lumineux qu'il a oublié de fermer sa portière, ou qu'il est en train de reculer.
Des hôtels, des restaurants, des gargotes, des stations services à foison. Une route colorée aux mille senteurs qui menait vers les rivages ensoleillés du midi.

Nostalgie surannée ? sans doute, mais dont le voyage sur cette route nationale m'a marqué à jamais.

La petite famille va maintenant poursuivre son voyage en vous laissant là, à ce carrefour de route, un peu comme l'on ferait avec un auto-stoppeur, en lui souhaitant bonne route et bonne continuation.


La déviation du Luc à ses débuts (milieu des années 1960). Même point de vue 60 ans plus tard.
On a conservé les lampadaires dirait-on. Image réactive.

200 mètres après le carrefour avec la D97, nous arrivons à la jonction sud des tracés RN7.
Le moment de parcourir dans le sens Sud/Nord le premier tracé qui passait par les ruelles du centre ville.

Ici aussi, rien n'est indiqué, alors dès que vous le pourrez, il faudra prendre la rue à gauche afin de pouvoir remonter la rue Jean Jaurès dans son sens sud-nord.


Jonction des tracés à la sortie du Luc. (Vue en direction de Brignoles)
à gauche la voie de contournement, tout droit la rue Jean Jaurès


L'entrée Sud du Luc, avenue Jean Jaurès. On remarquera la présence des indispensables stations services à l'entrée (ou sortie) de la ville.
Image réactive.

La rue Jean Jaurès n'est plus aujourd'hui que l'ombre d'elle même.
Il est loin le temps de la splendeur de l'Hôtel du Parc, dont on a conservé l'inscription sur le mur en souvenir.


Le Nouvel Hôtel du Parc, qui deviendra L'hostellerie du Parc. Recommandée par tous les guides touristiques de l'époque et les automobiles Club..
Les anciennes remises pour attelages à chevaux transformées proposaient désormais des garages pour auto "avec fosse" était-il précisé.
Image réactive.


En médaillon, l'enseigne restaurée et conservée.

Poursuivons.
Nous voici au carrefour névralgique du Luc.
Celui où la route nationale 7 croisait la route allant de Cabasse aux Mayons. (Les routes existent toujours, mais leurs dénominations a changé)
Il faut imaginer ici, vers les années 50, en période estivale, de longues files de véhicules chargés, tractant parfois caravane, remorque ou bateau, des camions et des autocars circulant dans des rues où l'on avait peine à se croiser.


La fontaine Ste Anne au carrefour de la route N7 (flèches noires) et de la route de Cabasse. Même lieu aujourd'hui. Image réactive.

Et comble du village Varois, comme si les rues déjà peu fonctionnelles ne suffisaient pas à ralentir la circulation, il fallait faire avec les encombrantes fontaines trônant au milieu de la chaussée, à l'instar du cours Mirabeau à Aix en Provence.
Mais poursuivons d'une centaine de mètre, jusqu'à la place de la Liberté.
Je vous entends déjà dire... "mais c'était mieux avant non ?"

Et bien disons que la place a été comme assainie ces dernières années.
Les arbres ont été rasés, remplacés par quelques mesquines jardinières de plantes.
La municipalité nous racontera sans doute que les arbres étaient malades, où dangereux.. et alors ! On ne pouvait pas en replanter de nouveaux ???


Bon je confirme... c'était beaucoup mieux avant ! Plus convivial.
Le coin donnait envie de s'y arrêter, d'y acheter le journal où son paquet de clopes.
De s'installer en terrasse à l'ombre bienfaitrice des arbres et d'y déguster un café ou un verre de limonade glacée.
Aujourd'hui, plus hostile... il n'y a pas !
Image réactive.

Bref poursuivons...par la moribonde rue de la République, aux commerces fermés, mise à part quelques Pizzas minutes et autres Kebabs....sans intérêts.
J'ai comme une envie subite de quitter rapidement les lieux.
Heureusement, le faubourg de la rue Lazare Carnot, encore dans son jus avec sa bordure de platanes le long d'un petit cours d'eau, nous offrira une transition rafraîchissante.

Nous ne tarderons pas à retrouver la jonction avec la déviation de 1963.


Ancienne Station Esso à l'entrée de la ville.


5 secondes d'image de la station en activité en 1968


Entrée/sortie Nord-Ouest du Luc, toujours dans son jus.

Nous en avons maintenant terminé avec le tracé originel, et nous pouvons réemprunter la déviation jusqu'à rejoindre la sortie Sud-Est du Luc.
Tracé originel ? Vraiment ? et bien non, pas tout à fait.
La toute première route est la voie Aurélienne, dont on retrouve une courte section au sud de la sortie du Luc en direction du Cannet des Maures.
La seconde route est l'ancienne route d'Italie, cette fois-ci au nord, vers l'ancien village du Cannet des Maures.


La voie Aurélienne, identifiée sur les cartes et dans les rues.


Carte d'état major. En rouge la route Impériale N°97, future RN7.
En Blanc, l'ancienne route d'Italie.
En jaune, une section de la voie Aurélienne.


Un dernier cliché, celui d'un resto routier aujourd'hui fermé, à la sortie du Luc.

En route -

A la sortie du Luc, la nationale 7 circule entre la voie Aurélienne sur notre droite et l'ancienne route d'Italie sur notre gauche, toutes deux aujourd'hui noyées dans le réseau des faubourgs urbains.
La sortie marque notre entrée immédiate sur la commune suivante : Le Cannet des Maures.

Le Cannet des Maures Km 0839

Le Cannet des Maures est un peu la zone industrielle et commerciale du Luc en Provence.
Alignement hétéroclite d'enseignes en tous genres, zone où plus exactement jungle urbaine où les anciennes stations service sont devenues des boulangeries, où les géants du hamburger côtoient les stations de lavage,
où les bureaux de tabac partagent l'espace avec des boutiques de matériel médical, des entrepôts de pneus, des pots de peinture ou des charcuteries.... hétéroclite je vous dis !

Bref..

En route -

Le Cannet des Maures est à l'origine un village perché, héritier du Castrum de Caneto, le camps retranché Romain qui assurait la sécurité de la plaine des Maures et de la voie Aurélienne qui passait en contrebas.
Au Moyen-Âge, le castrum est fortifié, une église y est construite et le village appelé désormais Le Cannet du Luc, est érigé en commune par le Roi René, comte de Provence.
Au cours des siècles suivant, le village, essentiellement agricole, va souffrir de sa situation géographique particulière.
Isolé sur une colline difficile d'accès, sans eau, sa proximité avec la route d'Italie favorise à l'époque les pillages et les invasions.
Rien d'autre ne viendra ébranler la vie du hameau au cours des siècles suivant, pas même la Révolution.
Si ! tout de même, en 1814 Napoléon 1er se rendant sur l'île d'Elbe passera une nuit au Cannet du Luc où il retrouva sa sœur Pauline au Château du Bouillidou.

L'arrivée du chemin de fer dans la plaine, en 1862, va considérablement accélérer le développement économique du village.
Un nouveau quartier, le Cannet des Maures, se crée tout autour de la gare alors que le vieux village est peu à peu délaissé, notamment à cause de ses difficultés d'accès et de son manque d’eau.
Le développement des activités autour du quartier de la gare, l’afflux des populations nouvelles ainsi que les difficultés de vie au Vieux Cannet vont décider de la délocalisation définitive du chef-lieu, de la butte vers la plaine.

Sources et extraits : https://www.lecannetdesmaures.com

Mais du Cannet des Maures, nous ne verrons en fait pas grand chose.
La route Nationale 7 ne fait que passer entre le vieux et le nouveau village.


Photo 1951. En blanc l'ancienne route d'Italie.
En jaune la route Royale, Impériale puis Nationale 97 de Toulon à Antibes, qui deviendra officiellement RN7 en décembre 1931.
En rouge déviation de la RN7 à partir de 1940 avec la construction du pont St Louis sur les voies
ferrées.
En Orange, la RN 558 en direction de St Troppez, avant 1940.

En bleu, la bifurcation pour St Troppez vers la RN 558 après la construction de la déviation RN7.


A la jonction avec l'ancienne route nationale.

En novembre 1940, le tracé de la route sera modifié aux abords du village, pour mieux coller à la physionomie des voies de communication entre la route de Toulon à Antibes (RN97 / 7) et la RN 558 en direction de St Troppez.
Plus tardivement arriveront les jonctions avec les autoroutes A8 et A57, faisant du Cannet des Maures un super échangeur routier.

A gauche le Cadastre Napoléonien : la route Royale / Impériale passait au pied du château du Bouillidou.
Après l'ouverture de la déviation à la fin des années 1930, cette section de route sera intégrée au domaine du château devenu depuis le domaine Colbert Cannet.
On constate devant la porte du domaine (petit cercle blanc) que la route n'était pas large, à cause du pont franchisant le ruisseau "vallon du Bouillidou".

A droite : aujourd'hui devant l'entrée du château Colbert Cannet, au niveau du petit pont sur le vallon du Bouillidou, là où passait la route nationale 97 / 7 jusqu'aux années 1940.

 

Le château du Bouillidou fut construit au XVII e siècle. Il fut racheté en 1835, avec le domaine attenant de 14 000 hectares par Louis-Etienne Colbert, descendant de la famille Colbert.
Son aïeule, Françoise Elisabeth de Rascas, avait en effet épousé en 1754 le frère du célèbre ministre de Louis XIV.
La famille de Rascas était elle-même une ancienne famille provençale, anoblie par le roi Louis XV lors de la création du marquisat du Cannet, dont le château, situé au haut du vieux village, avait été détruit par les Révolutionnaires.
De retour au Cannet, après un exil en Italie, la famille décida d'acquérir le château du Bouillidou, situé au pied du village, à proximité de la route vers l'Italie.


Le château du Bouillidou, vu de la route nationale 97. Un certain Napoléon y logea.

La grande et la petite histoire se rejoignent au Bouillidou.

Le 20 avril 1814, Napoléon fait ses adieux à sa vieille garde, à Fontainebleau.
L'Empereur déchu est lancé sur les routes de France.
Il va traverser le pays dans une berline à six chevaux dotée d’un lit, suivi par treize autres voitures et escortée par six cents cavaliers.
Les étapes se succèdent. Briare, Nevers, Roanne, Lyon.
Lorsqu' il arrive en Provence royaliste, les choses se gâtent.

Napoléon est obligé de voyager seul sur un cheval, déguisé d'un chapeau rond et d'une pelisse de cocher pour ne pas être reconnu.
A Aix, il emprunte le manteau, le gilet et la caquette à trois soldats pour poursuivre son voyage.

Le mardi 26 avril 1814, alors qu'il doit embarquer pour l'île d'Elbe à Saint-Raphaël, c'est ainsi déguisé que l' Empereur se présente en fin d'après midi au Château du Bouillidou où il est accueilli par Pauline Borghese sa soeur.
Devenue Pauline Borghèse à la suite de son mariage avec un prince romain en 1803, elle séjourne souvent dans ce château mis à sa disposition par son propriétaire et ami, un certain Louis Charles, député du Var.

L'occupante des lieux refuse tout d''abord de recevoir son frère ainsi vêtu. Elle lui enjoint de revêtir son habit d'Empereur !
Convenablement habillé, elle accepte de le faire entrer et de le guider par la longue allée qui mène à la façade du château, avec, dans l'angle, la tour carrée coiffée d'un toit pentu.

Napoléon vit là ses premiers moments heureux depuis son départ de Fontainebleau.
Pauline met à disposition tout le château pour son frère et son escorte et décide d'aller elle-même se loger ailleurs dans le village.
Le soir, elle dînera avec l'Empereur.

Source et extraits de l'article rédigé par ANDRÉ PEYREGNE, Var Matin du 20 septembre 2015.

Source et extraits : http://www.chateaucolbertcannet.com


La route nationale 7 à la périphérie du Cannet des Maures. Remarquez le garage et station OZO en face !

En route -

Poursuivons notre route sur la DN7.
Sur notre droite, on repère facilement l'église et en face, un garage à l'ancienne qui a traversé les âges. (voir photo ci-dessus)


Une ancienne station encore dans son jus


La vieille dépanneuse rejoindra la casse en 2019.


Le Cannet des Maures capital de la chaussure ??? ça se saurait !
Sculpture inexpliquée, dénommée la "Chaussure Fleurie" à hauteur de la gare.


Le Pont St Louis, inauguré le 24 novembre 1940.

 

 


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@ 2021