ETAPE 19 : de Mandelieu La Napoule (900km) à St Laurent du Var (950km)

04/06
← Antibes / Juan Les Pins / La Fontonne / La Brague →

 

Au carrefour suivant nous voici à Antibes.

Antibes / Juan Les Pins Km 0934 -

Antibes !
Si souvent signalée sur les anciennes cartes, bornes et plaques directionnelles d'avant 1860, nous voici arrivé au terminus de la Route Nationale de Paris à Antibes.

Pour rappel : à sa création, en 1824, la Route N7 est définie comme étant la route de "Paris à Antibes et en Italie, par Nice". Elle succède alors à la Route Impériale 8.

Jusqu'en 1860, Antibes est donc la dernière grosse ville de France parcourue par la RN7.
Le fleuve "Var" marque alors la frontière avec le Comté de Nice.
Le 18 août 1860, suite de l'intégration du Comté de Nice à la France, la RN7 est prolongée du fleuve Var jusqu'à Menton.

Antibes c'est le réunion de trois quartiers distincts réunis en une agglomération.

- Le Cap d'Antibes, c'est la presqu'île, ses plages, ses criques sauvages, son sentier du littoral, ses petits ports de plaisance, ses anciennes batteries défensives et ses fortifications, ses anses à l'abri des regards, ses superbes villas et le bois de la Garoube propriété du conservatoire du littoral. Vous avez la serviette et l'huile à bronzer ? ... Alors c'est par là !

- Juan les Pins c'est la station balnéaire chic et branchée, célèbre pour son activité nocturne, paradis des noctambules, ses bars à cocktails, ses discothèques, ses rhumeries, son casino, sa promenade en bord de mer, avec en bande son omniprésente : Le Jazz.
Vous souhaitez allez jusqu'au bout de la nuit ?...Alors c'est par ici !

Depuis la fin de la seconde guerre mondiale la cité balnéaire s'est imposée comme le temple du Jazz au travers de son festival estival international.

De Sidney Bechet à Ella Fitzgerald, de Duke Ellington à Ray Charles, Sonny Rollins ou Oscar Peterson, tous les grands du Jazz sont venus s'y produire, participant à la frénésie ambiante de Juan les Pins.


Les nuits frénétiques de Juan Les Pins.

- Le dernier quartier est celui de la cité historique Antipolis. Créée par les Grecs et développée par les Romains, la cité devint une véritable ville-frontière fortifiée sous Henri IV et Louis XIV.
Aujourd'hui les remparts moyenâgeux sont depuis longtemps tombés, mais il émane de ses ruelles pittoresques un charme intemporel qui n'est pas sans rappeler la proche Italie.
Vous envisagez la journée loin de route agitation bouillonnante ?.... Alors vous trouverez votre bonheur en parcourant les ruelles ombragées de la vieille ville.

Et notre Nationale 7 dans tout ça ?
Et bien elle traverse Antibes, se faufilant à travers des faubourgs plutôt urbains, tout en restant sagement à la périphérie de ces trois quartiers.

Aujourd'hui la D6007 vient se substituer à l'ancienne RN7, mais, arrivée tardivement elle n'en suit pas pour autant le tracé historique.
Dans son contournement actuel de Juan Les Pins et d'Antibes, la voie prend l'appellation de D6107, se superposant à la D6007. Tracé orange.
De 1824 à 1828 le tracé de la RN7 suit celui de l'ancienne Route Impériale 8, de Brignoles à Antibes par l'intérieur des terres, via Draguignan et Grasse.
Ce tracé est déclassé en 1828. Il débouchait à la sortie Nord de la vieille ville. Tracé violet.
Après 1828, le nouveau tracé de la Route Nationale 7 traverse les faubourgs d'Antibes par le Sud (à l'époque constitué de terres agricoles), et se superpose en partie à celui de la route de Toulon à Antibes,
jusqu'à atteindre la périphérie de l'antique cité, pour ensuite se diriger plein nord. (Tracé rouge - bleu - rouge).
Cette section de la route Toulon-Antibes (Tracé bleu) sera interrompue par la voie ferrée apparue vers 1860.
Malgré un passage à niveau (aujourd'hui disparu) cette section fut abandonnée au profit du tracé de la RN7 (Tracé rouge) qui franchit les voies ferrées grâce à un pont situé un peu en amont de l'ancien passage à niveau..

En route -

La traversée d'Antibes sera donc urbaine.
Avenue de Cannes, on prendra soin d'éviter la déviation par la D6007/ D6107 vers Nice, et l'on poursuivra la direction de Juan les Pins.
Rien d'exceptionnel dans le quartier, mais au carrefour avec la route de la Badine n'oubliez pas de serrer à droite afin d'emprunter le Boulevard Poincaré toujours en direction de Juan les Pins.


à la jonction des routes


Sur cette carte d’État Major de 1861, on remarque que la voie ferrée existe déjà, mais la route passe encore par le quartier de La Badine avant de franchir le réseau ferré par un passage à niveau.
Image réactive.

Tout droit vers la Badine c'est l'ancienne route de Toulon à Antibes.
Cet axe important, qui durant des siècles fut le seul existant, sera englobé vers 1828 par le nouveau tracé de la RN7, puis délaissé quelques années après la construction de la voie ferrée.
Une carte de 1899 fait déjà aparaître la nouvelle route franchissant les rails par un pont

Aujourd'hui le secteur de La Badine n'est plus qu'un quartier résidentiel ponctué de belles et chics villas.
Plus rien ne rappelle l'importance de cette ancienne route.


Seul élément remarquable route de la Badine : L'hôtel - pension de famille La Paquerette. Un écriteau indique : chambres libres - ouvert !!!
Ils ont oublié de préciser où se trouvait la machette pour se frayer un chemin ! (aujourd'hui l'hôtel est définitivement fermé transformé en villa). Image réactive.

Empruntons le Boulevard Poincaré sur notre droite.

Le boulevard Poincaré a beau être balisé de platanes, la magie ne prend pas.
D'ailleurs l'ombrage de la rue ne provient pas des arbres eux même, mais des ensembles immobiliers qui la bordent sans aucune harmonie architecturale.


Il reste encore quelques platanes le long du boulevard Raymond Poincaré


Le Boulevard Raymond Poincaré, assurément urbain :-(

Bref un quartier lambda. Seul lot de consolation : savoir que nous suivons les traces de la RN7.


En direction de la gare de Juan Les Pins. Même lieu aujourd'hui. Image réactive.

Le boulevard Raymond Poincaré retrouve bientôt la voie ferrée que nous avions abandonné à Cannes.
Le quartier devient plus résidentiel, mais néanmoins n'en devient pas plus attrayant pour autant.


Une borne oubliée vient confirmer ici le passage de la N7. On peut y lire (difficilement) Cros de Cagnes et Nice.

Changement de bord... Après le franchissement du pont sur les voies de chemin de fer, c'est le boulevard Gustave Chancel.


Pont du Colonial


La Route Nationale 7 franchit la voie ferrée sur le pont du Colonial en1954.
Même lieu aujourd'hui, image réactive.

Août 1957

65 vies en suspens au dessus du pont du Colonial.

Ils étaient 65 au départ de Cannes, dans le car de Nice.
La mort les attendait tous au pont du Colonial, qui enjambe la voie ferrée à 8 mètres de hauteur, à l'entrée d'Antibes.
La direction de l'autocar s'était bloquée défonçant le minuscule parapet, il glissa dans le vide.

En hurlant les passagers attendirent une mort ...qui ne vint pas.

Le car s'était fiché comme une flèche dans la terre du talus, en équilibre au dessus des rails.

A peine le dernier rescapé s'était-il extrait de la carcasse du car, qu'à 100 km à l'heure arrivait l'autorail Marseille-Nice.

 

Extrait article et photo Paris Match

 



Tout aussi maussade de ce côté -ci de la voie ferrée. Poursuivons...

Le quartier retrouve toute son activité citadine et commerçante aux abords de la médiathèque.
Si l'on veut rester dans les ornières du tracé historique de notre route, il va falloir maintenant nous jouer de la circulation en sens unique de certaines rues,


En rouge, le tracé historique, aujourd'hui en partie à sens unique.
En jaune la déviation actuelle.

A l'angle du Bd Chancel et de la rue Dugommier, le café de la "Porte de France" nous rappelle qu'Antibes se situait autrefois à la frontière du royaume de France.
Immuable et incontournable café de quartier, il a traversé les époques... que dis-je les siècles !
Imaginez combien d'automobiles il a vu défiler devant sa vitrine.

.
Implanté sur le tracé des Routes Nationales 97 puis 7, le Café de La Porte de France.
Remarquez la borne routière, on y lit 23 km depuis l'entrée dans le département.
Même lieu aujourd'hui. Image réactive.

Au carrefour avec le boulevard Dugommier, plus question de suivre l'itinéraire historique qui passait devant le Grand Hôtel de la place Macé (aujourd'hui place Charles de Gaulle).
Un sens unique vous oblige à prendre à gauche.

Le Grand Hôtel :

A peine les remparts arasés (note : vers 1895), commençait la construction de la nouvelle ville. Une page était tournée.
Enfin l'expansion de la cité, jusque-là gênée par les impressionnantes fortifications, allait pouvoir devenir une réalité.
Ernest Macé, architecte parisien à qui était dévolue cette lourde tâche, allait jeter les bases de ce qui est aujourd'hui la place De Gaulle : un vaste espace entouré d'immeubles haussmanniens.
À son extrémité, impressionnant par ses dimensions, se dresse le Grand Hôtel.

Ce grand bâtiment ne manque pas de style, comparé aux façades actuelles sans relief. Il faut prendre le temps de l'observer pour en déceler toutes les richesses.
N'oublions pas qu'il a été construit sur les plans de l'architecte Louis Eugène Copello, franc-maçon, qui, par son orientation philosophique, a su délivrer, par la décoration de la façade, beaucoup de messages.
Regardez-la avec attention : vous en découvrirez la richesse.

Les Antibois ont certainement encore en mémoire le grand hall de l'hôtel par lequel ils accédaient à la salle du cinéma Palmarium.
Ce vaste espace, après sa vocation première d'élément d'hôtellerie, abrite aujourd'hui l'enseigne Monoprix.

Du temps du Grand Hôtel, il était décoré de plantes vertes, doté d'un grand appareil de chauffage et garni de nombreuses tables et chaises pour le confort et le plaisir de la clientèle.
Une carte publicitaire précise : ascenseur, éclairage électrique dans toutes les chambres, téléphone, voitures à l'hôtel, un confort qui n'était pas courant à l'époque.

En 1911, la municipalité antiboise accordait l'autorisation de jeux dans le Casino municipal d'Antibes et son installation dans les locaux du Grand Hôtel.

Pendant la Première Guerre mondiale, le Grand Hôtel sera affecté à l'installation de l'hôpital temporaire n° 2.
Il remplira cette fonction jusqu'en juin 1919 sur décision du ministre de la guerre.

En 1940, après de nombreuses pérégrinations entre la mairie et le château Grimaldi, le Grand Hôtel abrite la bibliothèque municipale.
Cet emplacement en plein centre-ville lui donnera l'essor et la fréquentation escomptés.

Malheureusement, le Grand Hôtel subit en février 1968 un important incendie, alors que les pompiers antibois n'étaient pas encore dotés d'une grande échelle.
Il fit trois victimes bloquées en haut de l'escalier alors qu'elles tentaient de s'enfuir et occasionnera, d'après les estimations de l'époque, 2 à 3 millions de dégâts.
La bibliothèque souffrit énormément de ce feu qui détruisit environ 5 000 volumes et autant de revues.

Après l'inauguration de la médiathèque de la Casa, le 11 décembre 2006, les locaux occupés au Grand Hôtel sont libérés.
Depuis quelques temps, on assiste à la création de nouveaux magasins au rez-de-chaussée.

Le bâtiment a perdu sa vocation première, l'hôtellerie, après la Grande Guerre, mais reste un solide témoin de plus d'un siècle d'histoire(s) antiboise(s).

Source et extraits : Article René Pettiti pour Nice Matin - Publié le 28/06/2016

En route -

C'est également ici, place Charles De Gaulle, ou ancienne place Macé, que prenait fin la RN97, qui depuis 1824 était désignée comme la route de Toulon à Antibes.
Nous suivrons maintenant la RN7, définie comme la route de Paris à Antibes et en Italie par Nice, ancienne Route Impériale 8.

Laissons derrière nous la Place Charles de Gaulle et retrouvons la jonction avec le tracé actuel du Boulevard Dugommier, qui nous conduit jusqu'au pont sur les voies SNCF.


Au carrefour de l’Étoile, notre itinéraire croise une fois de plus celui de la RN 559 jamais bien loin.
Même lieu aujourd'hui. Image réactive.

Une fois de plus, franchissons les voies ferrées.
A son origine, simple pont à 2 voies surplombant uniquement les voies ferrées, il fut élargi en 1980, mais également allongé de manière à franchir une voie rapide, aujourd'hui la bretelle de la D 6107.


Le pont en 1956, court et sur 2 voies uniquement
.
On remarquera à l'angle des rues Dugommier et du Grand Cavalier une station service Esso. Image réactive

Après le pont, le carrefour des actuelles avenues Vautrin, Rochas et de la D6107 est le point de jonction du contournement de Juan les Pins / Antibes (D6107) qui débouche sur notre droite,
et de l'itinéraire historique de l'ancienne route Royale/Impériale/ Nationale qui passait par Draguignan et Grasse et qui débouche ici sur notre gauche.


Le carrefour de toutes les routes. A droite débouche la déviation de Juan les Pins/Antibes D6107, tout droit le parcours normal de la RN7 (D6007)
à gauche la route venant de Brignoles et Grasse, ancienne Route Impériale /
RN7 déclassée en 1828.

Le quartier est aujourd'hui méconnaissable, transformé en échangeur à la circulation plutôt dense et intense.


Voici le même carrefour à la fin des années 50, sur la RN7 en direction d'Antibes. A droite la route vers Grasse. Face à nous le pont SNCF.
Même lieu aujourd'hui, seul repère qui a traversé le temps, l'immeuble à la façade art déco. Image réactive.


Milieu des années 50.... entrée Nord d'Antibes. Vue en provenance de Nice. Il subsiste toujours aujourd'hui quelques points communs. Image réactive
Nous retrouvons au fond notre point de repère actuel, l'immeuble à la façade art déco, à l'époque tout seul.
La Station Esso est également toujours présente sur notre droite.
A gauche, les entrepôts détruits, cèdent leur place à une nouvelle double voie, du coup les platanes de bordure se retrouvent à jouer la séparation entre les deux chaussées.
On remarquera que la municipalité a également repoussée les limites de la ville, l'entrée d'Antibes aujourd'hui se situant à quelques km plus en amont de ce panneau d'agglomération.

En route -

On retrouve notre route historique sur 2 x 1 voie et l'on quitte rapidement les faubourgs de la ville pour attaquer la montée de l'avenue de Nice.
La Grande Bleue n'est jamais très loin, mais la route ici s'y tient à l'écart traversant le quartier des anciennes exploitations maraîchères.
Aujourd'hui les nombreuses serres ont laissé place aux immeubles de standing, aux lotissements et aux petits commerces de proximité.

La Fontonne.

La Fontonne c'est un quartier excentré d'Antibes, un village à part entière avec sa place, son église, ses commerces, mais aussi l'hôpital d'Antibes/Juan les Pins.
A l'origine de ce quartier, il y a une source, qui deviendra fontaine.. d'où le nom.
L'eau de la source acheminée par un aqueduc Romain, alimentait un lavoir situé en bordure de chemin.
Aujourd'hui, bien entendu, le lavoir et l'aqueduc ont disparu sous le bitume de la Route Nationale élargie au fil des siècles.

De récentes fouilles archéologiques ont d'ailleurs permis de mettre à jour des éléments de l'aqueduc.


La Route Nationale 7 à la Fontonne au début du siècle dernier. Même lieu aujourd'hui. Image réactive.


On le devine au premier plan, la route passait à l'époque sur un petit pont qui enjambait le cours d'eau.
Aujourd'hui, une partie de la bâtisse sur la gauche existe toujours, mais le cours d'eau est remblayé. Même lieu image réactive.

Le quartier de la Fontonne semble être le point culminant, car notre route amorce maintenant sa descente vers La Brague.

Un peu plus bas, un arrêt de bus m'interpelle. Pourquoi ce nom de "Tananarive" en bordure de N7 ?
Je sais bien que sous de lointains tropiques, Madagascar possède sa propre Route Nationale 7 qui sillonne le pays.
Mais nous sommes ici bien loin de l'océan indien.alors Quid ?


La réponse n'est pas sans rapport avec l'immeuble en arrière plan.

Voyez cet immeuble anodin, typique des constructions des années 60 avec ses commerces occupant le rez-de-chaussée.
En 1963, Charles Ahime, un promoteur immobilier débarqué de Madagascar rêve de créer ici son Grand Hôtel.
Le projet semble un peu fou, mais les immeubles sortent de terre autour d'une vaste piscine centrale.
Le Tananarive et ses 50 chambres peut s'enorgueillir d'accueillir ses premiers clients en quête de luxe.

Car l'hôtelier en avant-gardiste éclairé conçoit les choses en grand.
Toutes les chambres sont insonorisées, équipées de la télévision et de la radio, elles possèdent pour la moitié d'entre elles une salle de bain.
Climatisation dans tout l'hôtel, salle de congrès, deux restaurants dont un self service et un restaurant panoramique, un drugstore et ses boutiques façon US occupent tout le rez de chaussée.
Un bar américain, un tennis privé, la piscine d'été et des places de parking privatives complètent l'équipement de cet hôtel qui peut fièrement afficher ses trois étoiles.

Hélas, l'affaire est mal gérée, Charles Ahime fait faillite. L'hôtel ferme et reste un temps à l'abandon, squatté, visité, dépouillé.
Aujourd'hui propriété de l'office HLM, l'hôtel a été entièrement réaménagé en petits appartements.

En route -


Le Bazar de La Brague, ou le plaisir de retomber en enfance, un petit côté régressif qui n'est pas pour déplaire.


L'embouchure de La Brague, et de droite à gauche : la route du bord de mer (RN559/ 98), le pont SNCF, La Route Nationale 7.

La Brague Km 0941:

 

La Brague c'est ce court et étroit fleuve côtier qui au fil des siècles et des violentes crues, se joua des ponts et autres passerelles qui tentèrent à tour de rôle de le franchir.

La présence d'un pont situé plus en amont à l'époque Romaine est attestée puisque de nombreuses pierres de culée furent découvertes en contrebas dans le lit du fleuve.

On retrouve trace d'un pont après la Révolution vers 1890, où il est déjà question de reconstruire le pont détruit par une crue de La Brague.
Quelques années plus tard, en 1798, nouvelle crue, la route vers Nice se retrouve une fois de plus interrompue, le pont sur la Brague s'étant une nouvelle fois entièrement écroulé.

En attendant sa reconstruction, voyageurs et attelages sont détournés vers l'embouchure du fleuve, le passage s'effectuant à gué par la plage.

Le nouveau pont de bois reste fragile, obligeant à d'importants et fréquents travaux de consolidation en 1824 puis en 1828.

En 1872, c'est le tout récent pont de la voie ferrée qui cède au passage du Train Menton-Marseille, fragilisé par 15 jours d'intempéries. La Brague est en furie. Le train plonge dans les flots.

L’événement est relaté dans les journaux de l'époque sous le titre le Désastre de La Brague :

http://www.archeo-alpi-maritimi.com/desastrede1872.php

 


Le dernier pont de bois sur la Brague, avant son remplacement par un pont en pierre

Les réparations du pont routier ne suffisent plus. En 1903, un décret d'utilité publique déclare la destruction du pont de bois et sa reconstruction complète en "dur".
Le nouveau pont en pierre est finalement inauguré en octobre 1904.
Depuis lors, il tient bon et a même résisté aux crues dévastatrices de 2015 et 2019.

Inspiration et sources : article Nice Matin 24/02/2020 René Petiti.


Recto - vue côté terre, le pont de pierre en 1958, en arrière plan le pylône de la station TSF des PTT Nice Côte d'Azur. .
Verso - vue actuelle côté mer. Image réactive.

Le Pylône :

Entre 1935 et 1937, les PTT développent sur la côte un réseau TSF de stations régionales. La radio "Nice PTT Côte d'Azur" est née.
Le but est de diffuser sur la région et jusqu'en Corse, des informations locales.
On peut ainsi écouter des reportages sportifs régionaux, suivre en direct les festivités du carnaval de Nice ou encore celles de la fête des citrons à Menton.
Si les studios de radio se trouvent effectivement à Nice, le poste émetteur et son antenne de 120 mètres de hauteur est situé à La Brague.

Le bâtiment comprend des salles d'alimentation, des ateliers, des accumulateurs, un studio radio de secours, des locaux d'habitation et de fonction.

La guerre mettra un terme à "Radio Nice PTT Côte d'Azur".
Durant la guerre, l'émetteur de la Brague servira de relais pour la station "Paris PTT" puis pour la "Radiodiffusion Nationale", chaîne généraliste à caractère national créée par le gouvernement français de Vichy.

Source et extraits : https://www.radiotsf.fr/radio-nice-cote-dazur-le-pied-a-terre-des-ptt-sur-la-riviera/

Aujourd'hui le pylône est démonté, mais le bâtiment est le siège de la chaîne de télévision France 3 Côte d'Azur.

La plaine de la Brague :

Pendant la saison estivale, le quartier de la Brague constituait un centre touristique important des Alpes Maritimes, concentrant sur sa plaine en bordure de mer, les plus grands campings de la Côte d'Azur, pour certains les plus grands d'Europe.
En plus de ces méga-campings, le quartier drainait de nombreux commerces et activités, snacks, glaciers, boutiques d'articles de plage, restaurants, night-clubs, parcs d'attractions, fête foraine et Marineland.

Mais pourquoi parler de tout cela au passé ?

Dans la nuit du 3 au 4 octobre 2015, des précipitations d'une violence inouïe s'abattent sur le littoral des Alpes-Maritimes.
Tous les fleuves côtiers de la région débordent et se transforment en torrent durant les 3 heures d'orage.
Les inondations provoquent la mort de 20 personnes. L'une d'elle, une femme, perd la vie dans un camping en bordure de la Brague.
D'autres se noient dans leur voiture coincée dans un tunnel, dans des parkings souterrains ou au rez de chaussée de leur domicile.
Le quartier du Pylône est le plus durement touché.

Pour plus d'info : https://fr.wikipedia.org/wiki/Inondations_d%27octobre_2015_dans_les_Alpes-Maritimes

Plusieurs mois après, les décisions tombent. Quatre campings longeant la Brague, doivent fermer définitivement.
Ainsi en a décidé le préfet des Alpes-Maritimes.

Depuis, une renaturalisation des lieux est en cours, mais avec la fermeture des campings, le quartier n'a pas vraiment retrouvé sa frénésie estivale d'antan.

En route -

Franchissons le pont sur La Brague. A gauche, des palissades nous indiquent l'emplacement de l'ex-camping Le Logis de la Brague.


Le Logis de la Brague, c'est un camping mais également un restaurant dont on aperçoit ici la tourelle carrée. Même lieu aujourd'hui. Image réactive.


Un peu de bon temps à la terrasse du Logis... hélas fermé aujourd'hui.

Radiodiffusion, TSF (transmission sans fil) toute une histoire à La Brague.

Le secteur de la Brague, dès 1935, fut étroitement lié à l'histoire de la radiodiffusion locale grâce à son pylône émetteur de 100 mètres de haut implanté à proximité du fleuve côtier. (lire plus haut)

Ce secteur n'en était pas à son coup d'essai. Remontons le temps...

" En 1901, alors que les prémices des communications radio commencent à fleurir à cette époque sur le vieux continent, une page de cette histoire s'est écrite sur la Côte d'Azur, et plus précisément à Antibes.
Le quartier de la Brague abrite à l'époque un site expérimental que Guglielmo Marconi, physicien et homme d'affaires italien, équipe pour réaliser l'impensable, l'envoi d'un message par delà les mers, jusqu'en Corse.
Le 14 avril 1901, un message en Morse parcourt 175 km et parvient à Calvi, sur l'île de beauté.


L'antenne Marconi au pied du Logis de La Brague dont on reconnaît la tourelle.

Marconi a obtenu cette année-là les autorisations et les moyens pour tenter cette transmission inédite.
Il fait installer dans le quartier de la Brague, à Antibes, une salle opérationnelle et un pylône de 55 mètres de haut, constitué de trois mâts de bateau empilés les uns au dessus des autres.
La démonstration est une totale réussite pour Marconi et son équipe.
Il offre aux armées et aux empires de l'époque présents sur de nombreux continents, comme l'Angleterre et la France, un moyen pour leurs flottes de communiquer.
La portée commerciale et militaire de la TSF sera immense, comme le pressentait Marconi."

Extrait reportage France 3 TV


Une plaque rappelle l'événement.


Les campings se suivent... image réactive.

Après le rond-point, nous voici à hauteur du célèbre parc aquatique Marineland, invisible de la route.


En route vers Nice. A gauche notre route RN7 actuelle D6007, à droite, la voie ferrée et la Route du Bord de Mer ex RN98 actuelle D6098.


Après le Marineland, toujours sur la gauche un établissement de légende .... ça ne vous dit rien ?

La Bonne Auberge :

La bonne auberge c'est une histoire de famille qui débute en 1938.
La famille Baudoin achète ce mas provençal situé à l'époque au cœur des terres agricoles en bordure de la seule route du bord de mer qui relie Nice à Antibes.
La famille voit grand, puisqu'elle emploie pas moins de 50 personnes pour faire tourner cet établissement qui se veut d'exception.
Serveuses et maître d'hôtel, barman, 2 sommeliers et pas moins de 12 personnes pour armer la brigade en cuisine.
Les terres maraîchères autour du restaurant sont exploitées et fournissent fruits et légumes, poulets et lapins.
La proximité de la mer garantie la fraîcheur des produits de la mer.

Dès 1939, le succès est au rendez-vous, La Bonne Auberge reçoit sa première étoile au guide Michelin.
La seconde étoile est attribuée en 1951 et la troisième étoile reçue en 1954 inaugure l'Âge d'Or de la Bonne Auberge.


La Bonne Auberge, au fond on aperçoit le fameux pylône.

Le restaurant devient le temple de la gastronomie Française, rendez-vous des têtes couronnées et des chefs d'états, du gotha de la chanson et de tout le cinéma, festival de Cannes oblige.
On y croise .. Fernandel ou Raimu en habitués du lieu.
Stan Laurel et son alter ego Oliver Hardy y font également un passage - on a vu au chapitre précédent qu'ils tournaient l'un de leur dernier film sur la Côte d'Azur -.
La famille Chaplin fréquente elle aussi l'établissement.
Errol Flint y partage sa table avec Garry Cooper ou Eddie Constantine.
Juliette Gréco, Sean Connery, Sophia Lauren, Liz Taylor, Alain Delon, Romy Schneider, Omar Sharif, Orson Wells ou encore Kurt Jürgen honorent également l'établissement de leur présence.

Notre Johnny Halliday national n'hésite pas à venir y pousser la chansonnette, imité par une autre idole des années 60, Gilbert Bécaud.
L'établissement est aussi fréquenté par le Duc et la Duchesse de Windsor, Winston Churchill viendra y faire une visite surprise, Le Roi du Cambodge et l'Empereur du Laos font également partie de la clientèle huppée.
Plus tardivement on y croisera un certain Valéry Giscard d'Estaing.

En 1958 la Bonne Auberge perd une étoile, une seconde suivra bientôt. La famille Baudoin est endettée, c'est la faillite.
En 1973 c'est Joseph Rostang qui rachète l'affaire et place au fourneaux le chef Jacques Maximin qui récupérera la seconde étoile en 1974 puis la troisième étoile en 1980.

En 1985, la perte de cette "nouvelle" troisième étoile signe le déclin de l'Auberge qui ferme définitivement en 1991.

Une Pizzeria remplacera le restaurant gastronomique, puis le Comptoir 233, aujourd'hui le Zingara, histoire à suivre..

Pour en savoir plus : https://youtu.be/hzF70_o5aiE

Quelques mètres plus loin, la propriété Le Riviera n'est autre que l'ancien Motel Côte d'Azur.


Le Motel Côte d'Azur construit en 1954 sur le modèle US était à la pointe du confort et du modernisme pour l'époque. Image réactive.



Remarquez la station service en bas à droite dont on distingue la rotonde, l'automobile n'était jamais oubliée lorsque l'on dormait dans un Motel.
N'oublions pas que Motel est l'abréviation de "Motorists Hotel".


Fin des pompes à essence, la station est aujourd'hui transformée en biscuiterie et la rotonde a disparu.

On quitte Antibes à hauteur de la Biscuiterie d'Antibes, qui occupe aujourd'hui les locaux de l'ancienne station service du Motel Côte d'Azur.


La suite de l'étape

 


retour au sommaire

 

@2023